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Labo Arts & Techs

Les solutions DIY de Dasha Ilina pour "duper le numérique" - interview

Publié le 25/11/2019

Artiste activiste russe installée à Paris, Dasha Ilina aborde aussi bien les thèmes de cyberféminisme, de cybersurveillance que de dépendence à nos appareils numériques. Elle imagine et bricole des solutions DIY (do it yourself) aussi pratiques qu'absurdes pour répondre aux problèmes causés par les nouvelles technologies qu'elle présente sous forme de tutos vidéo, d'ateliers, de conférences et d'expositions.
Après avoir participé récemment à l'exposition Computer Grrrls à la Gaïté Lyrique (Paris), c'est à Stereolux qu'on la retrouve le temps de la journée thématique "Duper le numérique : brouiller, embrouiller, se débrouiller"



Quel est votre rapport à la technologie au quotidien ?

Celui de quelqu'un qui ne se rappelle pas vraiment du monde avant Internet !
J'ai grandi entourée d'appareils hi-tech, qui font complètement partie de ma vie à tel point que je ne peux pas imaginer vivre sans eux.
J'essaie quelques fois de sortir de chez moi sans mon téléphone pour ne pas être dessus tout le temps. Cette dépendance au portable, que je remarque et qui devient très sérieuse depuis quelques années, est ce qui m'a ammenée à travailler sur mon projet le plus récent - Center for Technological Pain.

  

Avec ce projet, je propose des solutions DIY aux problèmes de santé provoqués par la technologie, comme la sécheresse des yeux, les douleurs au cou, au doigt... Travailler sur ce projet et faire des recherches dessus m'a permis d'être plus consciente de la façon dont j'utilise la technologie.
Concernant la confidentialité ou les données personnelles, je m'appuie sur des connaissances antérieures et des recherches externes. J'essaie d'être plus prudente avec mes données personnelles, mais je sais que je pourrais sans doute l'être encore plus. 
 

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Pourquoi avez-vous voulu travailler sur le détournement de la technologie ?

Je pense qu'à notre époque il est important de critiquer la technologie. C'est tellement facile d'être technopositif parce qu'il n'y a pas besoin de faire des recherches pour en être, les informations qui placent la technologie sur un piédestal sont très accessibles et présentes dans les médias. Mais quand il s'agit de critiquer la technologie, il faut réellement faire des recherches pour comprendre, par exemple, de quelles manières nous sommes trackés. C'est pourquoi je pense que c'est très important de créer des projets artistiques qui explorent les effets nuisibles ou les différents problèmes qui découlent de la technologie.

 

Comment sont reçues les solutions DIY que vous imaginées, par le public et les professionnels du numérique ? 

Mon approche pour créer des solutions DIY n'a toujours été qu'à moitié serieuse donc je trouve toujours cela drôle de voir ce que les autres pensent de mon projet !
Je raconte toujours aux gens que mes solutions sont réelles et qu'elles aident pour les problèmes qui les concernent, mais en même temps elles créent dix nouveaux problèmes parce que ces solutions sont supposées être ironiques et humoristiques. Mon intention est d'aborder les problèmes d'addiction à la technologie d'une façon accessible à toutes et à tous. Quelques fois les gens me demandent si j'ai une diplôme médical, parce qu'ils tombent dans le piège quand je présente le projet d'une manière professionnelle. Ces moment sont toujours les plus drôles parce qu'ils signifient que je vends ces fausses solutions comme une vraie entrepreneure ! Ce qui est absurde mais pas impossible j'imagine. 

 

D'après vous, quel rôle peut jouer l'artiste numérique aujourd'hui ? 

Je pense qu'être artiste numérique est important aujourd'hui et revient à la question de travailler sur le détournement du numérique, car, comme je le disais plus tôt, je pense que c'est primordial de proposer des alterntatives aux scénarios technopositifs qui nous sont fournis par les médias, souvent même par ceux qui sont supposés critiquer la technologie. 
Mais je pense aussi que le rôle de l'artiste numérique est difficile car il veut communiquer à une audience aussi large que possible mais il est très difficile de toucher un large public, et c'est là que résident beaucoup de difficultés. Je pense que maintenant, la majorité du public se sent plus à l'aise avec la technologie, comme la réalité virtuelle. Les gens sont aussi plus ou moins au courant des problèmes de confidentialité avec les téléphones portables et les ordinateurs. Il appartient aux artistes numériques d'inclure le grand public dans le débat sur la technologie.
 

 



Qu'est-ce que le fait même d'imaginer détourner la machine raconte sur notre rapport à celle-ci ? 

Chacun.e a une relation différente aux machines et à la technologie en général mais je pense que beaucoup de gens oublient que même la plus intelligente des intelligences artificielles n'a pas la même capacité émotionnelle que les humains, et ne l'aura (probablement) jamais. Un ordinateur peut battre un humain à un jeu d'échecs mais il ne sera pas capable de partager son intelligence émotionnelle.
Mais bien sûr beaucoup de gens sont fascinés par les technologies émergentes, on peut le voir avec le robot Sophia. Quand je suis allée à un festival sur la robotique, la conférence donnée par ce robot a attiré énormément de monde, tellement que les gens ne pouvaient plus rentrer dans la pièce, ce qui n'a jamais été le cas sur les autres conférences avec des présentateurs humains. Pourtant, cette conférence par un robot était beaucoup moins intéressante que d'autres données par des humains. Mais même la conversation la plus basique avec un robot est dix fois plus excitante qu'une conversation intelligente avec un humain. 


Observez-vous une évolution de la place des femmes dans le numérique ? 

Oui en effet. Je pense que les gens deviennent beaucoup plus conscients des inégalités dans le secteur de la technologie, ce qui est définitivement une bonne chose. Je pense que c'est vraiment bien que plus de femmes soient incluses, j'espère juste que cela se produit pour les bonnes raisons et pas seulement pour remplir un quota.
Je suis aussi contente de voir qu'avec des femmes comme Claire L. Evans et son livre Broad Band  à propos de l'histoire oubliée des femmes dans la technologie, celles-ci soient enfin reconnues pour leurs contributions aux avancées technologiques, même avec un peu de retard.
ependant on ne peut pas non plus dire que tout va pour le mieux, par exemple cela n'empêche pas les gens de demander à une artiste numérique - en doutant de sa capacité donc - si elle a elle-même codé son propre projet ou si elle a elle-même assemblé les panneaux à LED...

APPEL À RÉSIDENCE «DUPER LE NUMÉRIQUE»

Publié le 17/10/2019

En prolongement de la journée thématique « Duper le numérique », qui aura lieu le 12 décembre 2019, Stereolux lance un appel à résidence afin de soutenir un projet abordant ce thème.

La journée « Duper le numérique » a pour objectif d’explorer les moyens possibles permettant de tromper les dispositifs de surveillance numérique, et les questions que de telles actions soulèvent : quelles sont les stratégies qui permettent de tromper les systèmes numériques et d’échapper à cette surveillance ubiquitaire ? Qu’est-ce que le fait même d’imaginer duper la machine raconte de notre rapport à celle-ci ?

L’APPEL À RÉSIDENCE

L’objectif de cet appel à résidence est donc de soutenir un projet abordant également ces thèmes.
Il vise à soutenir un projet artistique ou de design à une étape de recherche et d’expérimentation : réalisation d’une maquette ou d’un prototype de projet artistique / de design.
Cet appel à résidence répond à ces objectifs :

  • Prolonger les réflexions traitées lors de l’événement du 12 décembre et proposer des modalités d’approche qui ne soient pas uniquement « théoriques » ;
  • Proposer un regard original sur ce sujet, complémentaire des approches développées par les intervenants de la journée ;
  • Soutenir le travail d’un artiste ou designer numérique en lui offrant des moyens pour développer son projet ;
  • Faire émerger de nouvelles réflexions et travaux sur le sujet de la surveillance numérique, susceptibles de sensibiliser le public à ces enjeux.
     

APPORT DE STEREOLUX

Apport financier

Stereolux fournira un apport  financier pour soutenir le projet lauréat. Cet apport est réparti comme suit :

  • 1500€ HT au titre de la rémunération du lauréat - versé directement au lauréat ;
  • 1000€ HT (enveloppe maximum) dédiés à de l’achat de matériel - gérés par Stereolux.

Stereolux prendra également en charge les frais de transport et d’hébergement liés à la venue en résidence du lauréat.

Accueil en résidence

Le lauréat sera accueilli pour un temps de résidence de deux semaines (consécutives ou séparées) aux sein de Stereolux à Nantes en janvier/février 2020. Dans le cadre de cette résidence, il pourra profiter d’un accompagnement technique par l’équipe de Stereolux.

Accompagnement et visibilité

Le lauréat pourra également profiter d’un accompagnement sur la structuration et la poursuite de son projet, ainsi que d’une valorisation de ce projet via le site internet de Stereolux et ses réseaux sociaux.


CONDITIONS DE CANDIDATURE

Cet appel à résidence est ouvert à tout artiste ou designer de plus de 18 ans, qu’il soit étudiant ou non.
Les candidatures collectives sont acceptées.
La date limite de candidature est fixée au 30 novembre 2019.

informations & candidature

Les fantômes de l’art numérique

Publié le 09/10/2019

Ésotérisme arty et techno-chamanisme

Laurent Diouf
Article rédigé en partenariat avec le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux

L’art a toujours flirté avec le spiritisme. Des œuvres premières dictées par les esprits des ancêtres au surréalisme guidé par les papillons de l’inconscient, ce n’est pas nouveau. Ce qui l’est, en revanche, c’est la persistance de l’ésotérisme, du paranormal dans ses manifestations les plus singulières au cœur même des objets techniques nés de l’électricité puis de l’électronique. La magie réinjectée ou débusquée dans la technologie… Un formidable terrain de jeu pour les artistes du numérique et du multimédia. Petit florilège d’installations et performances qui jouent avec le surnaturel et son cortège de réalités alternatives.

 

Activités paranormales

Si on établit le listing des phénomènes qui sont rattachés de près ou de loin au paranormal, on obtient un inventaire à la Prévert. De la parapsychologie aux expériences médiumniques, de la divination au magnétisme, le champ est large. Très large. Pour sa part, Véronique Béland s’est attachée à une manifestation emblématique : l’aura. Son installation interactive pour aura et piano mécanique donne l’occasion à chaque spectateur d'expérimenter ce mystérieux phénomène de rayonnement lumineux qui est censé entourer le corps (As we are blind, 2016). Au préalable, le spectateur est invité à scanner sa main via un appareil qui révèle son aura. Une fois l’image imprimée, les données de ce champ électromagnétique sont codées et servent de partition pour un piano mécanique qui joue une courte mélopée. Au même titre que les empreintes digitales, chaque individu est censé avoir une aura qui lui est propre. Le spectateur entend donc la mélodie de sa propre cartographie émotionnelle.

Avec Édith Dekyndt, c’est la salle d’exposition, et non le spectateur, qui est soumise à un phénomène d’ondes et de lumière. Pour cette performance, l’artiste fait appel à un radiesthésiste qui arpente l’espace d’une galerie (Radiestesic Hall, 2009). Il évalue les spots d’énergies telluriques. À sa suite, Édith Dekyndt reconsidère la salle d’exposition qui voit ses murs ravalés selon la gamme chromatique dite de Bovis. Une classification qui associe les vibrations du sol à une couleur spécifique. Un lieu d’apparence ordinaire se voyant ainsi transfiguré selon la répartition de ses taux vibratoires.

As we are blind, installation interactive pour aura et piano mécanique, Véronique Béland, 2016 - Photo DR

Diagrammes alchimiques

Huimin Wu utilise également l’espace et l’exposition en elle-même comme support (Cérémonie de prières, galerie Incognito, avril/juin 2019). Avec elle, pas de bâton de sourcier mais des pratiques traditionnelles chinoises d’orientation comportementales qui entrent en correspondance avec de la vidéo, du son, du texte, une scénographie. Dans un autre genre, Ingrid Burrington convoque toute une mythologie digne des donjons et dragons (sorts, incantations, sceaux, …) pour révéler la “vraie” nature d’Internet, et trace des pentagrammes dont les figures symbolisent des circuits intégrés (The Realm of Rough Telepathy, en collaboration avec Meredith Whittaker, 2016). En marge de ses réflexions sur la nature d’Internet, Ingrid Burrington s’intéresse aussi à l’alchimie. Plus précisément, elle en renouvelle le sens en pratiquant la transmutation des métaux en désossant de vieux iPhone (Alchemy Studies, 2018).

Dans le cadre de son projet Hexen 2.0 (2009/2011), Suzanne Treister intègre également des diagrammes alchimiques, des arcanes du tarot, des schémas psychotiques, … Elle s’inspire notamment des conférences de Macy qui ont eu lieu dans l’après-guerre. Réunissant scientifiques, sociologues et psychologues, ces rencontres ressemblaient parfois étrangement à des séances de spiritisme… Ce travail d’exhumation et d’accumulation de documents improbables est à interpréter comme une histoire allégorique, et surtout parallèle, de la cybernétique, de la genèse d’Internet et de la société de surveillance moderne, comme une dénonciation de la dimension occulte du pouvoir et des nouvelles technologies.

Moins conspirationnistes, Cullen Miller et Gabriel Dunne ont conçu une “machine à sort” personnalisée (Claves Angelicae, 2018). C’est avant tout un dispositif bienveillant puisque son utilisation est subordonnée à un échange avec des ONG et associations caritatives. Le public est invité à concevoir sa formule magique en sept étapes via un écran tactile. Il suffit de tendre la main et de diriger des cercles dans un diagramme, puis d’enregistrer des mots. Un QR code permet de s’approprier la formule qui transite ensuite via le réseau Ethereum (un protocole d’échange décentralisé doté de sa crypto-monnaie sur le modèle du Bitcoin). Au final, un petit bras robotisé trace l’équation rituelle sur un bout de papier à conserver précieusement…

Alphaloop, Adelin Schweitzer - Photo DR

Mauvais augures

Parmi leurs nombreux projets, James Auger et Jimmy Loizeau s’intéressent aussi au domaine de la prédiction. En témoigne leur dispositif Real Prediction Machine (2014). Ces petits cônes surmontés d’une couronne métallique qui tourne en envoyant une lumière stroboscopique ne sont pas sans rappeler la fameuse Dream Machine de Brion Gysin mise au point en 1960 par Ian Sommerville ; protohistoire des œuvres d’art mécaniques entrant dans le champ de la paranormalité. Mais ici, ce sont les Big Data, notamment dans le domaine de la santé, et non plus les rêves, qui animent les machines. Les algorithmes permettent d’interpréter l’avenir. Nous sommes suspendus à cette surveillance dont les indices sont souvent synonymes de mauvais augures…

C'est aussi le sens d’Augury (2018), l’inquiétante installation de Tobias Revell, en collaboration avec Wesley Goatley. Projetée au plafond, une vidéo laisse apparaître des formes noires qui tournoient en groupe comme des essaims d’étourneaux. Une voix chuchote des phrases absconses. Quelques sigles apparaissent en surimpression. On identifie quelques phrases qui résonnent comme des slogans (We are the change that we seek…). En fait, les points virevoltants matérialisent la position des avions qui volent dans un rayon de 20 km par rapport à l’installation, en live, sur le modèle des sites de flight tracker, et sont “mixés” avec des tweets, eux aussi récoltés à proximité. La combinaison et la mise en scène de ces données étant censées permettre de prédire l’avenir… Si ce dispositif a des résurgences lointaines avec l’ornithomancie chère aux Grecs et aux Romains, on peut aussi y voir une sorte de Cargo Culte inversé, où l’indigène occidental, connecté et “bio-responsable”, scrute le ciel comme ses ancêtres.

Radio Mycelium, Martin Howse - Photo DR

L’algorithme fantôme

Le collectif RYBN réintroduit également de la magie dans la machine et dans le réseau. L’idée étant de pervertir et subvertir les bots, les logiciels robots qui œuvrent notamment pour la finance (The Algorithmic Trading Freak Show, 2013), en modifiant leurs algorithmes qui se mettent à obéir à des équations qui tirent leurs prémices de schémas ésotériques, entre thème astral et pentagramme, loin des principes de la science des marchés (ADM XI). Et ça marche ! Une fois dans le circuit, ces automates financiers fonctionnent “normalement”.

Avec la série Data Ghost, il s'agit également de faire ressortir le caractère irrationnel de ces calculs. Ainsi Data Ghost 2 : Golem (2017) est présentée par RYBN comme une machine computationnelle et introspective, kabbalistique et récursive, qui étudie inlassablement les traces écrites de son activité interne, les logs, dont l’exégèse donne forme à des séries de commandes compulsives qu’elle exécute frénétiquement. Encore plus cryptique, Data Ghost 3 est un dispositif enfoui dans les sous-sols d’un immeuble, à l’écoute du spectre électromagnétique. Prototypes de “tracking psychique”, ces Data Ghosts s’inspirent et renouvellent aussi le phénomène de voix électroniques.

 

Electronic voice phenomena

Ces phénomènes de voix électroniques ou EVP (de l’anglais Electronic voice phenomena) sont caractéristiques de cette translation du paranormal vers la technologie. Même les fantômes vivent avec leur temps ! Ils ne communiquent plus par l’intermédiaire de guéridons, mais en émettant quelques borborygmes dans les interstices des fréquences radio et bandes magnétiques. Dans un brouillard de bruits parasites, on croit déceler de courts messages énigmatiques de disparus célèbres ou inconnus. Konstantin Raudive, Raymond Cass et Friedrich Jürgenson furent pionniers en ce domaine. Leurs travaux ont été redécouverts par des musiciens expérimentaux et ensuite par les artistes sonores.

Mathieu Schmitt se base ainsi sur les travaux de Jürgenson pour qui les défunts nous envoient des messages sur 1 485 kHz… Il a conçu une installation dont la structure filiforme évoque les pavillons des gramophones (Friedrich, 2009). Calé sur cette fréquence, l’appareil crache une succession de bruits blancs et parasites. Comme le précise Mathieu Schmitt, si vous décelez quelque chose, il y a de fortes chances que ce soit pour cause d’apophénie, phénomène psychologique qui nous amène à trouver du sens dans le chaos. S’inspirant de L’Ève du futur de Villiers de L’Isle-Adam, Aleksander Kolkowski bricole aussi des pavillons de phonographes, suspendus et censés amplifier des EVP. Cette installation symbolise l’andréide fabriqué par Thomas Edison qui apparaît dans ce roman précurseur de la science-fiction (sans-titre, 2016).

Cécile Babiole a trouvé son inspiration dans Le Château des Carpates de Jules Verne pour son installation Reflection (2015), une salle aux murs tapissés de miroirs avec un haut-parleur qui répercute des voix spectrales ricochant comme les silhouettes des spectateurs. Cette pièce s’inscrit dans l’imaginaire développé autour de la voix des morts, née avec l’invention des dispositifs d’enregistrement et de transmission du son, le néo-spiritisme des EVP et dans une certaine tradition incantatoire de la poésie sonore. L’installation vidéo sonore de Mathieu Schmitt Phantom (2009) se base aussi sur un processus de répétition, en l’occurrence celui du mot “fantôme”, séquencé et modulé. Figés dans l’écoute, les spectateurs ne voient rien, ou si peu, que les squelettes d’arbres morts noyés dans un brouillard. En fait, les spectateurs font partie intégrante de l’installation : ils jouent leurs rôles d’âmes errantes, immobiles et silencieuses, se déplaçant mentalement dans l’univers virtuel proposé.

Radio Mycelium, Martin Howse - Photo DR

Maison hantée

Olivier Morvan mise sur l’accumulation d’objets et de sons pour son projet La Maison Tentaculaire (2016), à la fois film génératif et installation labyrinthique. Cette drôle de maison c’est celle de Sarah Winchester. L’histoire est vraie et cela rend encore plus saisissante cette proposition. L’héritière des célèbres carabines verse dans le spiritisme, pratique en vogue à la fin du XIXe siècle. Un médium l’incite à faire ses bonnes œuvres par égard à toutes les victimes des Winchester. Elle se lance alors dans la construction d’une maison à San José en Californie. Les travaux débutent en 1884 et ne s’arrêteront qu’en 1922, au décès de sa propriétaire. Pendant 38 ans, guidée par des esprits pas toujours bienveillants, Sarah multiplia les plans, les pièces (160 dont 40 chambres), les innovations high-tech pour l’époque, les bizarreries architecturales (escalier menant au plafond, placards sans fonds, fenêtres ouvertes sur le sol, portes donnant dans le vide, passages dérobés, …) et bien sûr les références au nombre 13…

Le philosophe historien d’art Georges Didi-Huberman et le photographe Arno Gisinger ont procédé également par accumulation, multipliant les images de visages comme des petits pains, pour leur installation Mnémosyne 42 - Nouvelles histoires de fantômes (2014). Didi-Huberman et Gisinger s’inspirent de l’Atlas Mnémosyne, une sorte d’encyclopédie forte de dizaines de milliers de photographies. Pour Aby Warbur à l’origine de cette recension, l’art (et singulièrement l’art des images) est une histoire de fantômes pour grandes personnes. Cette installation reprend la thématique du deuil et des lamentations correspondant à la planche 42 du fameux atlas. Plus de 1 000 images sont projetées, envahissant le sol et les murs du lieu d’installation, bruissant des douleurs muettes des personnages saisis sur les clichés. Le spectateur est invité à déambuler parmi ces fantômes…

 

Techno-chamanisme

De fantôme il en est encore question avec Adelin Schweitzer, mais sous forme d’une sculpture interactive (Ghost n.1, 2013). D’aspect très steampunk, ce fantôme robotique oscille comme un pendule et se déplace selon un itinéraire très chaotique. Rattaché au Collectif Deletere, Adelin Schweitzer se définit aussi comme un “techno chaman”. L’événement Technomancie(1) initié par ce collectif est assez révélateur de cette approche pétrie d’univers parallèles générés via les outils numériques. Des univers où manipulation de la réalité, hyperespace, multi dimensions, univers de poche, plan astral, s’entrecroisent dans les propositions sonores et visuelles des artistes du collectif.

Avec Alphaloop, Adelin Schweitzer “ré-enchante” ainsi l’usage du téléphone via une intervention immersive et déambulatoire où les participants, munis de casque VR, sont invités à se laisser guider par un chaman moderne et à appréhender le réel transfiguré comme sous l’effet de psychotropes… Cette performance fut présentée sous forme d’une restitution vidéo, à la manière d’un totem, avec encens, pentagrammes vidéographiques et devices obsolètes en offrandes, lors de l’édition 2017 du Festival Gamerz. Le paradoxe, peut-être, de cette déambulation chamanique, c’est qu’elle est “exposée” au grand jour alors que la “tradition” veut que ce genre de pratiques s’effectue dans la nuit du secret.

Radio Mycelium, Martin Howse - Photo DR

Animisme 2.0 et maraboutage 3D

Avec ses dispositifs qui relient, au propre comme au figuré, les phénomènes géophysiques, électromagnétiques, organiques et psychiques, l’artiste britannique Martin Howse cède également aux rituels techno-chamaniques. Comme un sorcier des temps modernes, il invente un animisme 2.0. Martin Howse se met à l’écoute des signaux du vivant, opère des greffes entre appareils électroniques et plantes, établit un dialogue inter-espèces avec des champignons (Radio Mycelium, 2018), cherche à faire parler la terre (Terra Muta), conçoit un ordinateur bio-organique (Sketches towards an Earth Computer, 2015), pratique la divination dans les fumées de l’industrie chimique (The Final Session, 2019) ou par le biais de modules audio (The Dark Interpreter, 2017).

Il ne manque plus que le vaudou. Quentin Destieu s’en est emparé pour punir Bre Pettis là où il a pêché… Cet opportuniste, peu scrupuleux et vénal, a breveté les principes de l’imprimante 3D développés gratuitement par la communauté open source pour en faire l’exploitation commerciale. En retour, Quentin Destieu a donc réalisé d’étranges mannequins à l’effigie de Bre Pettis. Ils portent les stigmates de bugs informatiques liés à un prototypage défectueux et sont, comme les célèbres poupées vaudou, hérissées d’aiguilles (Maraboutage 3D, 2017).

 

(1)   Technomancie 02, les 12 et 13 octobre 2019, Couvent Levant, Marseille. http://technomancie.deletere.org/

Situé à la jonction des arts numériques, de la recherche et de l’industrie, le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux contribue activement aux réflexions autour des technologies numériques et de leur devenir en termes de potentiel et d’enjeux, d’usages et d’impacts sociétaux. www.stereolux.org

Article publié dans la Revue AS - Actualité de la Scénographie N°226
Le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux s’associe avec les Éditions AS (Actualités de la scénographie) pour une série d'articles consacrés aux technologies numériques, à l'art et au design. L'occasion de partager un point de vue original et documenté sur le futur des pratiques artistiques, en particulier dans le champ du spectacle vivant.

L’usage des applications mobiles

Publié le 09/10/2019

Art et spectacle vivant

Maxence Grugier
Article rédigé en partenariat avec le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux

Il est clairement bientôt révolu le temps où l’on nous demandait “d’éteindre nos portables” avant un spectacle ou dans un espace public dédié à l’art en général. Aujourd’hui, que ce soit en concert, au théâtre, à l’opéra, ou même dans un musée, nos téléphones (nos smartphones) et nos tablettes font désormais intégralement partie de l’événement, du show, de la visite, au même titre que les artistes qui ont contribué à l’œuvre – et du même coup, que le public, qui s’affranchit ainsi d’une certaine passivité et participe plus ou moins activement à la création. État des lieux et panorama.

Mirages & Miracles de Adrien M & Claire B - Photo © Adrien M & Claire B

Avec l’essor de l’industrie créative (voir AS 224) et l’implication des différents domaines de développement informatique actuels – qui vont de l’ingénierie et des start-up à l’écosystème de la production numérique en général – dans la création de spectacles et l’élaboration d’œuvres d’art (installations, présentations muséales, performances, ...), il semble de plus en plus évident que ce que nous appelons de manière générique “applications mobiles”, ou plus communément “applis”, ou “app” (comprendre : un programme ou un ensemble logiciel développé dans un but donné) sont en passe de devenir des éléments incontournables, ou tout du moins omniprésents, dans la production culturelle contemporaine. Ces programmes que sont-ils ? Ils couvrent un large éventail d’usages et de fonctions. Plus généralement, un traitement de texte, celui sur lequel j’écris cet article, est une application. Les programmes d'édition d'images ou de retouches photos sont des applications, tout comme les jeux vidéo, les progiciels (ensemble de programmes destinés à un des secteurs bien précis d’une entreprise, ...) Pour s'exécuter, ces applications utilisent les services d’un système d'exploitation (MacOS, Linux, Windows, iOS ou Android sur certains téléphones et tablettes) et en utilisent les ressources matérielles comme support.

Le développement exponentiel actuel d’applications de toutes sortes et fonctions (en 2017 : 178,1 milliards d'applications mobiles ont été téléchargées et en 2018 le chiffre se monte à 205,4 milliards(1)) ; il ne se résume pourtant pas à la création de jeux vidéo ludiques destinés à occuper nos déplacements en transport en commun, ni aux logiciels de retouches d’images automatisées, si populaires sur les différentes plates-formes de réseaux sociaux. Des artistes, nombreux, développent, ou font développer, des programmes souvent simples d’utilisation, qui permettent d’“augmenter” leur création. Pour certains, une application vient seconder la mise en scène et fait ainsi partie de l’ensemble de la scénographie d’un spectacle. Pour d’autres, l’application est elle-même une part intégrante de l’œuvre, proposant ainsi au public de découvrir une forme artistique sous un angle inédit et innovant.

 

Art participatif et expérientiel

Si l’on doit se pencher sur la façon dont le développement d’applications mobiles sert activement dans le cadre de spectacles, de performances ou d’expositions, en augmentant leurs propositions originales, il faut bien sûr évoquer l’intérêt de ce champ d’activités pour le participatif, l’interactivité et ce que l’on appelle en général l’expérientiel. Dans les arts dits “numériques”, l’usage de formes augmentées, dites participatives, expérientielles ou immersives, permettent de faire entrer le public dans une autre dimension : celle du spectateur/créateur/acteur. En s’appuyant sur les capacités de certaines créations numériques actuelles à questionner le réel et à le transporter vers de nouveaux univers oniriques, virtuels, mixtes, le spectateur, tantôt acteur, tantôt observateur, est de plus en plus souvent invité à s’immerger et à participer. En usant des technologies numériques contemporaines et en intégrant smartphones, tablettes et applications au cœur de la création, les artistes contemporains, numériques ou non, qu’ils soient plasticiens, metteurs en scène, chorégraphes (voire scénographes), danseurs, musiciens ou comédiens, peuvent désormais agir activement sur les dimensions spatiales et parfois sensorielles expérimentées par le spectateur tout en sollicitant la force de son imaginaire grâce à ces nouveaux dispositifs. Ce n’est donc plus uniquement l’artiste qui agit ici mais bel et bien le public, participant et expérimentant activement une œuvre. Ce principe participatif et expérientiel est au cœur de nombreuses créations actuelles.

Jeux d’interfaces

Les interfaces sont le lien indispensable qui unit spectateur et œuvre par le biais d’une couche d’abstraction numérique : l’interface permet de “vivre” l’œuvre, d’en faire l’expérience. Dans ce domaine, les technologies de réalités augmentées et mixtes sont reines (pour une définition, voir AS 210, 211, 212). On le voit avec des travaux comme Blind Sculpture de Marie Lelouche. Il s’agit d’une œuvre composite qui a pour élément central une sculpture physique tangible, présentée dans un espace d’exposition classique, à laquelle viennent s’agréger d’autres formes, virtuelles elles, rendues visibles uniquement grâce à une application mobile comprenant un dispositif audiovisuel et un système de localisation dans l’espace. Le spectateur, muni d’une tablette, se déplace dans un environnement de réalité mixte où virtuel et réel sont imbriqués. Avec cette sculpture, l’artiste Marie Lelouche invite le spectateur à naviguer entre différentes strates de réalités superposées dans un même espace. Blind Sculpture fait se croiser numérique et (im)matérialité. Ici ce n’est pas tant la sculpture qui est “aveugle” mais le public qui raterait l’œuvre s’il n’utilisait pas l’interface proposée à l’entrée de l’exposition, puisque c’est uniquement grâce à elle que l’œuvre apparaît dans son entièreté.

Idéalement, ce jeu avec les interfaces est aussi le propos du duo d’artistes lyonnais Adrien M & Claire B, bien connu pour leur spectacle Pixel (développé avec Mourad Merzouki). Initialement issus du spectacle vivant et du graphisme, Adrien Mondot et Claire Bardainne offraient à voir en 2018 une exposition qui a beaucoup tourné : Mirages & Miracles. Conjuguant réalité augmentée et réalité mixte, l’exposition offre à voir une autre dimension du réel. L’usage de la réalité augmentée, grâce à la simplicité de son mode de diffusion (smartphones et tablettes suffisent pour en faire l’expérience) permet de bouleverser la notion de réel en y invitant des hallucinations numériques qui viennent augmenter une série de sculptures organiques, bois flotté et galets polis par les éléments. L’application, téléchargeable sur Google Play ou Apple Store, permet au spectateur/visiteur de faire apparaître des danseurs invisibles sans interface, pratiquant de légères chorégraphies magiques sur des éléments réels et bien tangibles. En incarnant une nouvelle forme de réalisme magique, les technologies numériques consentent à la matérialisation des mirages évanescents et célèbrent leur capacité à transformer notre perception du monde tout en suscitant une mutation de l’expérience artistique.

Mirages & Miracles de Adrien M & Claire B - Photo © Adrien M & Claire B

Damasio pour smartphone

Inspiré d’un chapitre du nouveau roman de l’écrivain de science-fiction français Alain Damasio, Les Furtifs(2), M.O.A. (My Own Assistant) est un parcours en réalité augmentée pour smartphone, développé par Charles Ayats et Marie Blondiaux pour la société de production de jeux vidéo Red Corner. Le scénario est basé sur une libre adaptation d’un moment de ce nouveau roman et l’application est un des modules d’un ensemble plus vaste d’œuvres réalisées autour du livre (dont une partie est adaptée en parallèle pour la scène par Frédéric Deslias/LeClairObscur – voir Soft Love dans AS 212). Voici comment les auteurs présentent l’application : “Bienvenue dans M.O.A., votre assistant personnel. À travers lui, la ville de 2040 s’ouvre à vous. Publicités et surveillance s’entremêlent pour mieux vous servir et vous asservir. Y échapperez-vous ? Concentré sur l’imaginaire de la ville déployé par le roman Les Furtifs, ce projet de jeu en réalité augmentée est de rendre palpable ce futur qui nous guette déjà. Les outils de réalité augmentée aident à incarner le techno-cocon dans lequel nous somnolons, ainsi qu’à mesurer et critiquer nos réactions et nos addictions”. Par le biais d’une déambulation dans un espace public accompagné de cette application, le joueur/acteur apprend en répondant à des questions et en réalisant des actions qui questionnent l’omniprésence de la publicité numérique et des technologies de contrôle dans notre environnement. Encore en développement, la finalisation de cette application est prévue à la fin de l’année, tandis que de la version bêta test du prototype a déjà été proposée au public à Paris (à La Gaîté Lyrique), à Strasbourg (au Shadok, fabrique du numérique) et à Lyon (au Festival de science-fiction des Intergalactiques) en présence de l’auteur Alain Damasio et de son éditeur Mathias Echenay (La Volte) en avril.

Smart music

Objet emblématique (et polémique) du divertissement contemporain omniprésent dans notre société wireless et connectée, le smartphone, dans sa dimension créative, est donc aujourd’hui largement utilisé au cours de spectacles, de performances et d’interventions. Dans le domaine du jeu bien sûr, mais aussi de l’art (plastique, contemporain) ainsi qu’en musique et en format spectacle. À vrai dire, la musique est même l’une des disciplines reine qui participe au développement d’applications ludiques et artistiques. On se penchera par exemple sur le travail de Xavier Garcia et ses différents outils créés par la suite de logiciels Smartfaust, sous forme de concerts participatifs et d’une application éponyme développée par le Grame pour chœur et soliste. Le Grame de Lyon, à l’origine du Festival Musique en Scène, fut également à l’origine d’un Flash-mob pour concert de Smartphones (2016) présenté comme un concert improvisé interprété à l’aide de vos appareils sans toucher l’écran puisque le mouvement seul du téléphone générait le son. D’autres événements, comme des Battle de Smartphones pour orchestre de téléphones ont lieu à l’initiative du Festival, permettant l’implication du public dans un axe transgénérationnel.

Blind Sculpture - Photo © Marie Lelouche

“App” pour musique visuelle

Autre réalisation faisant appel à la facilité d’acquisition (un simple téléchargement sur les plates-formes de distribution en ligne, Google Play ou App Store) et d’utilisation des applications smartphones couplées à de la réalité augmentée : le projet de Brian Eno et Karl Hyde d’Underworld visant à “augmenter” l’écoute d’un album de musique via une “app”. Cette application de RA (réalité augmentée), disponible uniquement pour Iphone et Ipad, est particulièrement poétique. Avec cette “app”, les acheteurs de Someday World, l’album à quatre mains d’Eno & Hyde paru en 2014, peuvent voir fleurir une étonnante cité virtuelle ondulant au rythme de la musique s’ils dirigent leur smartphone sur la pochette, ou même le disque du duo. L’expérience se vit encore plus pleinement avec la version vinyle grâce à la rondelle centrale du disque sur laquelle une architecture digitale virtuelle se met à bouger, éclore, grandir et pulser en suivant les harmonies et les rythmes de la musique électronique composée par ces deux maîtres du genre. Grâce à cette application de réalité augmentée, le son devient un objet tangible, devient visible. C’est aussi ce à quoi s’attache Augmented Groove, une application distribuée gratuitement et développée par une équipe américano-japonaise qui permettra sous peu de générer des objets 3D réagissant aux sons et aux rythmes des différentes musiques proposées dans des clubs ou des concerts. Cette technologie, appliquée aux smartphones classiques, sera beaucoup plus immersive encore quand elle sera compatible avec l’utilisation de casques RV (comme Oculus Rift ou Samsung Gear).

Blind Sculpture - Photo © Marie Lelouche

Musique contrôlée par smartphone

Tant qu’à parler d’applications smartphones dédiées à la musique, impossible de passer à côté de l’aspect participatif également présent dans les musiques actuelles. Une tendance qui tend à se confirmer tous les jours. Un exemple récent a vu le jour avec la collaboration de DJ Chloé, l’un des fleurons des musiques électroniques françaises et de l’Ircam, le fameux Institut de recherche et coordination acoustique/musique qui se consacre à la création musicale et à la recherche scientifique depuis plus de 40 ans. Chloé X Ircam (c’est le nom de l’outil) fut proposé pour l’ouverture de la Fête de la musique 2015 et voyait l’artiste française utiliser les nouvelles technologies web audio de l’Ircam pour concevoir une expérience sonore interactive dans laquelle les sons circulaient de ses machines aux smartphones du public. Les danseurs, bénéficiant d’un aperçu de la playlist de la DJ via le web, pouvaient lancer certaines séquences via leurs téléphones, influençant ainsi la tonalité de la soirée en choisissant les morceaux sur lesquels elle rebondissait, prouvant sa vivacité et son talent.

Someday, application - Photo DR

Smartland Music

Du côté des installations qui conjuguent smartphones et musique, on trouve Smartland Divertimento, une œuvre créée par Stéphane Borrel (compositeur), Christophe Lebreton (concept et développement applications Faust) et le Random (Lab) de l’ESADSE (École supérieure d'art et design Saint-Étienne – Design écrans et structure), qui utilise cet outil de communication désormais usuel dans la création d’un écosystème de smartphones. Une jungle électronique, qui s’anime et communique chacun des appareils – présentés au bout d’une tige comme dans une forêt numérique – s’écoute, se répond et étincelle de façon autonome à la façon des lucioles dès que le visiteur muni de son propre appareil et de l’application proposée sur le cartel du lieu d’exposition entre dans la pièce où ils sont présentés. Le matériau sonore utilisé est le rire enregistré. L’installation articule des rythmes et joue pleinement de cette matière vivante, heureuse, humaine, émouvante – ou étrange – auquel le public est invité à participer.

Leur large diffusion, leur simplicité d’utilisation et leur coût modique (quand elles sont payantes), mais également le bénéfice d’un panel d’utilisateurs croissants, font des applications mobiles un passionnant laboratoire de création. L’ouverture au public et l’aspect participatif/expérientiel de ces technologies incitent à s’engager et attisent les curiosités. Face aux grands bouleversements techniques de notre siècle – et à un public de plus en plus captivé par les gadgets – les artistes, créatifs, acteurs et auteurs doivent cependant rivaliser d’imagination pour continuer à fasciner les foules. C’est donc à la fois avec intérêt que nous devons continuer à nous pencher sur ses développements, mais aussi avec méfiance, car l’art est une question de fond et pas uniquement de présentation.

Someday, application - Photo DR

(1)   https://www.statista.com/statistics/271644/worldwide-free-and-paid-mobile-app-store-downloads

(2)   Éditions La Volte, 2019

Situé à la jonction des arts numériques, de la recherche et de l’industrie, le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux contribue activement aux réflexions autour des technologies numériques et de leur devenir en termes de potentiel et d’enjeux, d’usages et d’impacts sociétaux. www.stereolux.org

 

Article publié dans la Revue AS - Actualité de la Scénographie N°225
Le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux s’associe avec les Éditions AS (Actualités de la scénographie) pour une série d'articles consacrés aux technologies numériques, à l'art et au design. L'occasion de partager un point de vue original et documenté sur le futur des pratiques artistiques, en particulier dans le champ du spectacle vivant.

 

L’économie créative dans le spectacle

Publié le 09/10/2019

Maxence Grugier
Article rédigé en partenariat avec le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux

“Changement de paradigme salutaire” et “levier majeur du développement économique et culturel” pour les uns, fâcheuse appropriation du secteur culturel et créatif par une “nouvelle économie” nébuleuse pour les autres, les tenants de l’économie créative (start-up, agences de développement économiques, industries du divertissement, ...) s’imposent pourtant bel et bien en pratique comme des vecteurs d’évolution notable (en matière de technologies notamment) et comme de nouvelles façons de penser les collaborations possibles – et effectives – entre arts et spectacle, création et innovation. Entre promesses et réalisations, panorama d’un mariage souvent forcé qui accouche cependant, dans les faits, d’intéressantes réalisations.



Laval Virtual - Photo DR

Pour aborder un sujet aussi complexe que celui que nous allons essayer de traiter ici, il est important de se poser quelques questions. Pour commencer : les industries culturelles et l’économie créative partagent-elles les mêmes missions, les mêmes buts ? Une question qui revient à se demander en substance : quelles différences existe-t-il entre les industries culturelles et les industries (en tant que secteur économique) créatives ? Si on suit les préceptes de la Commission européenne publiés en 2010, 2014 et 2015(1), nous pouvons déterminer que l’industrie culturelle s’entend comme un vecteur de diffusion de la culture dans tous ses domaines (musiques actuelles, danse, théâtre, jeux vidéo, médiathèques, musées, biennales d’art, expositions, ...) et que cela comprend également ses manifestations de matériels commerciales (vente de produits dérivés, disques, DVD, jeux vidéo, places de concerts, de spectacles, ...). Pour les institutions, l’industrie culturelle est donc une manifestation de “la culture à but lucratif”.

Toujours pour la Commission européenne, la fonction de l’économie créative est essentiellement fonctionnelle et s’envisage comme un intrant. En effet, ce secteur économique, mais aussi créatif, se situe en amont de la diffusion et de la distribution de biens culturels. Il s’agit de la part d’économie (et d’industrie) qui rend possible l’existence de certaines formes d’art et spectacle, ainsi que sa diffusion au grand public. Ce domaine inclut par exemple le design et l’architecture (qui intègrent tous les deux des éléments créatifs dans des processus plus larges), ainsi que des sous-secteurs comme la création de mode, la conception graphique ou la publicité. Mais est-ce si simple ? Pas vraiment, d’autant que cette notion ne semble pas faire consensus. En réalité les deux secteurs sont souvent intimement liés. C’est ce qui en fait un sujet d’observation ambigu et l’objet de nombreuses critiques, tant dans le secteur institutionnel qui considère la culture à l’aune du coût, que dans le secteur créatif qui y voit souvent une trahison des valeurs traditionnellement attachées au secteur de la culture.

Pour simplifier, on préférera donc dire de façon plus saine que l’économie créative est un ensemble qui réunit différents secteurs d’activités, tant économiques qu’artistiques et créatifs, fondés sur des valeurs de talents, d’imagination, de création et de ressources, individuelles comme collectives, de ses acteurs.

 

Entreprendre dans la culture

Bien évidemment la notion d’entreprenariat est importante dans le champ de l’économie créative. On peut même dire que le profil créatif + gestionnaire y est vivement encouragé (et recherché). Même si la “rationalisation budgétaire” fut longtemps difficilement admise dans le milieu du développement de la culture (en général sous prétexte d’inadaptation des outils de gestion pas ou peu adaptés à rendre compte des processus complexes de la création artistique : la symbolique des œuvres, les dynamiques parfois fluctuantes de la créativité et la dimension hédoniste de la consommation des produits culturels, …), force est de constater qu’aujourd’hui, ces outils auparavant utilisés par les multinationales et les plus grandes institutions culturelles sont en passe d’être considérés comme essentiels, même au sein des organisations les plus modestes. De fait, ils sont déjà à l’origine d’une économie au sein de la culture. Le développement logiciel et les formations d’apprentissage qu’ils nécessitent sont désormais au cœur de la gestion de lieux de diffusion et forment le principal secteur de l’économie créative(2) à l’origine de la conception et mise en œuvre d’outils de management de projet, des protocoles de référentiels des postes au sein des différentes structures, outils comptables, gestion de documents partagés, plate-forme de communication interne, logiciel d’archivage et de conservation, …


Archangel, réalité virtuelle - Photo DR

Des dispositifs sont mis en place pour favoriser ce développement tout en ouvrant à la créativité et l’innovation. Depuis quatre ans, par exemple, le ministère de la Culture et l’Institut du financement du cinéma et des industries culturelles soutiennent le Prix IFCIC Entreprendre dans la culture(3). Une plate-forme d’expérimentation et de visibilité de projets originaux portés par un incubateur dit “éphémère”, accompagné par la French Team (une agence de conseil et d’ingénierie culturelle spécialisée dans l’entrepreneuriat culturel) qui s’est tenue du 1er au 3 juin 2018 dernier au Liberté Living Lab (Paris) et dont la prochaine session est actuellement en cours d’appel à projets(4). Le prix IFCIC Entreprendre dans la culture récompense des entreprises ou associations ayant développé, dans le secteur culturel, un modèle économique ou une forme d’organisation originale, responsable et/ou durable. Son ambition est de mettre en valeur les démarches entrepreneuriales créatives d’acteurs du secteur culturel, de soutenir et d’amplifier ces initiatives.

 

Un paysage de start-up

On l’a vu, les acteurs de l’économie culturelle et créative sont rattachés à l’économie des arts et de la culture sous l’angle de leur économie et de leurs dimensions organisationnelles. Ici, la notion de créativité, au sens de l’innovation, dépasse celle de la performance artistique et du contenu. Dans ce cadre, impossible d’échapper à l’essor des start-up, souvent porteuses d’idées et d’apport original et innovant. Dans ce domaine, le développement technologique prime : qu’il soit au service du spectacle d’un point de vue structurel et technique (scénographie, ingénierie de la scène) ou au centre de l’apport créatif technologique (réalité virtuelle, augmentée, mixte – voir AS 210, 211 et 212), programmations logiciels destinées à l’art et au spectacle – musique, théâtre, danse et cinéma – technologies du jeu vidéo, … Sans oublier le secteur de la communication et de la diffusion (technologies du web, vidéo, streaming, …) et le secteur des technologies purement informatiques quand elles se destinent à alimenter des supports (réseaux haut débit, ordinateurs, matériel électronique de consommation, …) dont les start-up sont le maillon indispensable en matière de recherche et développement (R&D).

Ces start-up à fort potentiel d’innovation sont au cœur de ce nouveau modèle économique. Depuis dix ans, on voit régulièrement apparaître des sociétés qui s’impliquent dans le domaine de la création. Qu’il s’agisse de la digitalisation des contenus et leur mise en réseau avec la création de plates-formes de vente en ligne d’œuvres d’art (ArtJaws, Kazoart, Singulart, Artsper), de réservation d’artistes (Orrlando), de création de contenu et d’information, de newsletters thématiques et quotidiennes autour du monde de l’art ou du spectacle (Artsy, Artips) ou encore de diffusion (Bright pour l’art contemporain, Coal pour l’art à orientation développement durable) ou bien de jeunes entreprises qui développent des technologies orientées art et spectacle en collaborant régulièrement avec les petites structures artistiques et culturelles, comme les plus grandes.

C’est le cas de toutes celles qui se développent actuellement dans le champ des technologies scénographiques, ou dans le domaine du concert (support de technologie de studio, mais aussi laser, vidéo, installations scéniques, ...) qui sont trop nombreuses pour être détaillées ici. De fait, de Marie-Claude Pietragalla (M. et Mme Rêve, danse en immersion 3D en 2013) à Gilles Jobin (l’an dernier avec VR_I , passionnante expérience de danse en réalité virtuelle qui a fait le tour du monde) en passant par les artistes numériques Adrien Mondot et Claire Bardainne pour leur spectacle Hakanaï et Pixel, le fameux Cirque du Soleil avec leurs spectacles à haute teneur en innovations – scéniques, mais aussi technologiques – ou Joris Mathieu et sa pièce de théâtre pour imprimantes 3D et robot industriel Artefact (voir AS 216), sans oublier Blanca Li et son spectacle Robot, tous font désormais appel aux sociétés de production dédiées aux nouvelles technologies (RV, robotique, intelligence artificielle, ...) intimement liées au monde de l’économie créative.

 

La vitrine Laval Virtual

S’il est un secteur de l’économie créative où l’interaction entre la création et l’économie fait modèle, c’est bien celui des nouvelles technologies. Bien que cela soit un secteur également industriel et fortement concurrentiel, il n’en constitue pas moins un vivier d’expérimentations passionnant car toujours en mouvement. Dans ce domaine, si l’on devait choisir une vitrine pour marquer l’importance de cette économie culturelle et créative dans le monde de l’art et du spectacle aujourd’hui, ce serait immanquablement le salon international de Laval Virtual en Mayenne, véritable réservoir et présentoir de cette créativité des start-up créatives. Cette année encore, comme tous les ans en mars, le salon international propose pour sa 21e édition un panorama des technologies du divertissement, mais pas seulement puisque désormais, toute la gamme de la réalité “virtuelle” est opérationnelle dans des domaines aussi variés que le design, l’architecture, la recherche, l’industrie, les médias, le transport ou la santé. Les techniques de motion design, de modélisation en 3D, de scénographies immersives ne font plus seulement partie de ce que l’on appelait “la réalité virtuelle”, elles sont aujourd’hui utilisées dans de nombreux autres environnements, en art plastique, dans le spectacle vivant, dans les bureaux d’études, ... Le salon s’accompagne également d’un vaste programme de conférences sur la réalité virtuelle, augmentée, mixte et les différentes techniques immersives(5). Ici, à l’image de la majeure partie de l’économie créative, la réflexion intègre davantage la notion de besoin et d’usage.

Dans quel secteur ces technologies seront les plus utiles ? On le voit régulièrement dans les pages de la revue : dans tous ! À ce titre, Laval Virtual expose une palette de projets extrêmement variée qui se retrouve dans l’intitulé des prix remis au cours de la manifestation : “Meilleur contenu en réalité virtuelle/augmentée”, “Environnement et santé”, “Culture, art et patrimoine”, “Ingénierie”, “Construction”, “Jeux vidéo” et enfin “Divertissement”. À Laval se rencontrent des artistes, des spécialistes et professionnels des systèmes d’information, de la science et de l’industrie du monde entier : Japon, Corée, États-Unis et Europe réunis. L’objectif étant de mettre noir sur blanc les plannings des différentes feuilles de route des utilisations futures de ces techniques de pointe. Même si ces technologies sont souvent mises en avant au détriment des contenus, il n’en reste pas moins vrai que Laval est un environnement de veille privilégié pour les professionnels de l’industrie culturelle, producteurs, tourneurs scénographes, artistes du spectacle vivant, musiciens, graphistes ou communicants. L’intérêt étant que l’évènement fait le point de jonction entre économie créative (start-up, industrie, innovation) et acteurs de la culture au sens large.


Artefact de Joris Mathieu - Photo © Nicolas Boudier
 

L’innovation en question

À l’origine de tout projet il y a un maniaque investi d’une mission”, déclarait le professeur, consultant américain en management d'entreprise, auteur et théoricien Peter Drucker. Une mission et une idée, souvent issues de la vision d’un entrepreneur, du talent créatif d’un artiste, de l’ambition d’un individu ou du travail méthodique d’un chercheur. C’est là – et surtout là – que se trouvent les enjeux de l’innovation. Une notion qui est bien évidemment discutable (et discutée). Pourtant, les différents champs de l’innovation dans leurs quêtes de nouveauté ne font pas qu’imposer un modèle unique. En rendant concrètes les abstractions issues des laboratoires de R&D, elles sont aussi créatrices de nouveaux protocoles, de nouvelles façons de travailler – ou de collaborer – dans le secteur culturel et créatif. Que ceux-ci soient axés production ou modélisation et prototypage. L’innovation va également jusqu’au marché : elle relie la créativité artistique et les processus industriels en empruntant des voies parallèles, celles de la culture et donc, d’une certaine vision “sensible” du monde. Si la création est le domaine des artistes, l’innovation est celui des start-up, tout autant que celui des ingénieurs et des techniciens, et ceux-ci sont intrinsèquement liés dans des domaines créatifs et culturels comme les arts et techniques de la scène, l’architecture, le design ou la conception de logiciels. Dans le vaste paysage de l’innovation que l’on essaie peut-être un peu trop de nous vendre en grossissant le trait, on ne peut que constater que tout fonctionne à force de synergie et d’équilibre entre leviers créatifs et économiques. L’importance de l’économie créative dans les domaines de l’art et du spectacle est donc inhérente à l’intégration des découvertes de l’innovation.

À l’image du cinéma, “cet art qui est aussi une industrie”, le secteur de l’économie créative est inséparable à la fois des avancées techniques et des talents de la “classe créative”(6) qui la composent. Reste que la différence entre innovations techniques et créations tiendra certainement toujours dans ce que l’on appelle le capital humain, ce facteur indéfinissable qui fait des créatifs une population “à part” dans l’environnement économique de la culture (et des autres secteurs). Car au-delà de l’économie, tous les modèles de la créativité sociale ont leurs racines dans les dons et les talents individuels. Les arts et la culture ont beau être aujourd’hui envisagés comme des secteurs économiques, ils n’en restent pas moins le territoire de l’imagination au pouvoir. Rêvons encore un peu…

 

(1)   https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/opinions-information-reports/opinions/industries-creatives-et-culturelles-un-atout-europeen-valoriser-dans-la-competition-mondiale

(2)   https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2012-4-page-191.htm

(3)   https://forumentreprendreculture.culture.gouv.fr/

(4)   forumentreprendreculture.fr (date de clôture des candidatures : 29 avril 2019)

(5)   https://www.laval-virtual.com/fr/accueil/ (du 20 au 24 mars 2019)

(6)   Selon la définition du fameux penseur contemporain Richard Florida

Situé à la jonction des arts numériques, de la recherche et de l’industrie, le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux contribue activement aux réflexions autour des technologies numériques et de leur devenir en termes de potentiel et d’enjeux, d’usages et d’impacts sociétaux. www.stereolux.org

 

Article publié dans la Revue AS - Actualité de la Scénographie N°224
Le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux s’associe avec les Éditions AS (Actualités de la scénographie) pour une série d'articles consacrés aux technologies numériques, à l'art et au design. L'occasion de partager un point de vue original et documenté sur le futur des pratiques artistiques, en particulier dans le champ du spectacle vivant.

Soutenir la création artistique sous toutes ses formes : une mission au coeur du projet de Stereolux

Publié le 21/08/2019

Laboratoire et vitrine de la modernité technologique et artistique, Stereolux est reconnu pour être un lieu de diffusion d’envergure. Proposant concerts, spectacles, expositions, performances et conférences, son activité ne se résume pourtant pas seulement à cette pluralité d'événements.

En effet, Stereolux est tout autant un lieu de création et d’accompagnement d’artistes locaux et internationaux. Recherche, incubation, expérimentation, hybridation, répétition… Stereolux soutient les artistes à différentes étapes de leurs travaux, que ceux-ci débouchent sur des spectacles, performances ou installations. Stereolux propose également aux artistes des temps de restitution devant un public, comme en juin 2019 avec Hocus Pocus et à l’automne avec le rappeur rennais Lorenzo.

Au fil de la saison, Stereolux accueille ainsi des musiciens principalement issus du territoire et des créateurs d’art numérique à la fois locaux et internationaux qui témoignent de l’importance de ces résidences de création.


Découvrez quelques chroniques de ces temps passés entre les murs de Stereolux :

 

L’accompagnement à la création artistique de Stereolux (2016/2018) en quelques chiffres :

13 créations musique soutenues
25 créations arts numériques soutenues
créations jeune public
54 groupes accompagnés dont 97% département, 2% région et 2% hors-région
37 artistes arts numériques accueillis en résidence dont 54% du département, 32% nationaux et 14% internationaux
394 jours d'accueil en répétitions et résidences Musique, Arts Numériques et Jeune Public

Ces projets sont rendus possibles et réalisables grâce à nos précieux mécènes, qu’ils soient individuels ou d’entreprises.
 

 

vous êtes une entreprise ?

Stereolux propose des partenariats d'entreprises qui sont autant d'opportunités d’affirmer son attachement à la création artistique, au territoire et à ses citoyens, sous forme de parrainage ou de mécénat.
Plus d’informations


vous êtes un particulier ?

Vous pouvez contribuer, quel qu’en soit le montant, à la mise en oeuvre et au développement de l’émergence et de la professionnalisation d’artistes locaux, accueillis et accompagnés en résidence.
Plus d’informations

Plus d’informations sur les dispositifs d’accompagnement et d’accueil des artistes à Stereolux

LES RENDEZ-VOUS DU LABO : DÉCOUVRIR LES RÉFLEXIONS ET LES OUTILS DES ARTISTES DU FESTIVAL SCOPITONE

Publié le 12/07/2019

Les artistes du festival Scopitone seront particulièrement sollicités lors de cette édition : en plus de leurs installations, live ou performances, vous pourrez profiter de leur travaux et réflexions dans le cadre des Rendez-vous du Labo.

Miniconférences, workshops, masterclass, tables rondes… complètent ainsi le programme artistique du festival et permettent de s’emparer autrement des problématiques et des questionnements soulevés par ces artistes, ainsi que des outils qu’ils utilisent. Autant d’occasions pour écouter, apprendre, s’inspirer, discuter, en présence de ceux qui constituent les forces vives de la création d’aujourd’hui.

Ces rendez-vous  s’adressent aux passionnés de création numérique, professionnels du secteur, étudiants, développeurs, designers, artistes ou amateurs éclairés.

Artistes du festival présents sur les rendez-vous du Labo :

ANDREAS LUTZ 

Exposition :

  • Offset xyz + Soft Takeover : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Frigo 1

Performance :

  • Binary Supremacy : samedi 14 sept. à 18h00 / Ancien MIN

Rdv du Labo :

  • Conférences “Alternatives Interactions”  : le vendredi13 sept. à 15h30 / Cellule 31

  


DAVID BOWEN

Exposition :

  • tele-present wind : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Halle à marée

Rdv du Labo :

  • Conférences “Alternatives Interactions”  : le vendredi 13 sept. à 14h30 / Cellule 31

 


MOLECULE

Live :

  • -22,7°C + Acousmatic 360° : vendredi 20 et samedi 21 sept / Ancien MIN

Rdv du Labo :

  • Masterclass : samedi 21 sept à 16h00 / Cellule 29

  


SEBASTIAN WOLF ET MICHAEL KUGLER

Exposition :

  • Brume : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Frigo 1

Rdv du Labo :

  • Les Miniconférences de Scopitone : Samedi 14 sept. à 14h00 / Cellule 29

 


JULIEN BAYLE

Performance :

  • structure.Live : jeudi 19 sept. à 18h00 / Scène Halle à marée

Exposition :

  • structure.workshop.installation : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Frigo 1

Rdv du Labo :

  • Les Miniconférences de Scopitone : samedi 14 sept. à 14h00 / Cellule 29
  • Workshop « Sonification du geste avec max8 » : mercredi 18 sept. et jeudi 19 sept. / Cellule 29

   


MARTIAL GEOFFRE-ROULAND (SCREEN CLUB) ET PIERRE DELMAS (SUPERSCRIPT²)

Exposition :

  • Translate : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Halle à marée

Rdv du Labo :

  • Les Miniconférences de Scopitone : Samedi 14 sept. à 14h00 / Cellule 29

 


ALEX VERHAEST

Exposition :

  • Temps Mort : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Frigo 3

Rdv du Labo :

  • Les Miniconférences de Scopitone : samedi 14 sept. à 14h00 / Cellule 29

 


THOMAS GARNIER

Exposition :

  • Cénotaphe 0 : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Frigo 1

Rdv du Labo :

  • Les Miniconférences de Scopitone : Samedi 14 sept. à 14h00 / Cellule 29

 


SCENOCOSME

Exposition :

  • EXISTER : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Halle à marée

Rdv du Labo :

  • Table ronde « Approche écoconsciente de l'art numérique » : vendredi 13 sept. à 11h00 / Cellule 29

 


QUENTIN DESTIEU (DARDEX)

Exposition :

  • Machine 2 Fish V2 : du vendredi 13 au dimanche 22 sept. / Halle à marée

Rdv du Labo :

  • Table ronde « Conservation de l’art numérique » : vendredi 13 sept. à 16h00 / Cellule 29

 

SCOPITONE / RENDEZ-VOUS DU LABO : LES ENJEUX ACTUELS DES ARTS NUMÉRIQUES

Publié le 12/07/2019

Cette année à Scopitone, les Rendez-vous du Labo présentent plusieurs temps pour débattre de thématiques fortes - environnement, parité, pérennité - qui trouvent un large écho, à la fois dans le quotidien de chacun et dans le milieu des arts numériques, dont elles dressent les nouveaux et cruciaux enjeux.

Comment faire œuvre en respectant les contraintes créatives écologiques, afin de développer de nouvelles formes d’art « durable » ? Quelle est la place des femmes dans l’art numérique ? Comment conserver les oeuvres numériques ?

Des problématiques qui contraignent les artistes à se remettre en questions et à évoluer, comme le rappelle Vanessa Lorenzo, chercheuse et designer travaillant au carrefour des médias, de l'art et de l'écologie, invitée à la table ronde "Approche écoconsciente de l'art numérique" : 

"La plupart des interactions entre l'humain et notre planète se font à travers des objets technologiques régis par des opinions intégrées dans du code ; algorithmes influencés par un dualisme séparant la nature de la culture, la biosphère de la technosphère. Cette approche partielle hante notre perception d'une réalité largement aliénée. Cependant les crises écologiques poussent les artistes à adopter des méthodologies pour y faire fasse et à fusionner des disciplines. Ils se réapproprient des outils techniques et scientifiques pour les interroger. Ainsi, en fusionnant les médias électroniques avec le monde vivant, nous changeons de perspective, de narrateur, et nous libérons une société en délire face a des paysages aliénés. En créant ces écologies de médias hybrides, nous explorons de nouvelles façons de raconter des histoires qui proposent des futurs alternatifs."

 

LES ÉVÉNEMENTS
 

Table ronde "Approche écoconsciente de l'art numérique"
Ven 13/09 – 11H > 12H30

Aujourd’hui, toute une génération d’artistes formés à l’usage de nouvelles technologies énergivores et polluantes se trouve confrontée aux enjeux d’importance que sont le respect de l’environnement, l’engagement dans une transition écologique active et l’incitation à opter pour une économie de la récupération. Passage en revue.


 

Table ronde erreur 404 "Où sont les femmes ?"
Ven 13/09 – 14H > 15H30

Le monde de l’art en général, et celui des arts numériques en particulier, a un problème : le manque de parité. C’est un problème au sujet duquel il n’existe pas de solutions toutes faites. Pour autant, il mérite que l’on s’y penche.


 

Table ronde "Conservation de l'art numérique"
Ven 13/09 – 16H > 17H30

Les œuvres interactives, génératives, performances ou lives AV, quel que soit leur degré de numéricité, n’ont jamais été aussi nombreuses. Pour autant, beaucoup d’acteurs de la création – à commencer par les artistes – se questionnent désormais sur la pérennité des œuvres numériques. Existe-t-il une DLC (date limite de conservation) pour les œuvres numériques ? Comment les sauvegarder pour les générations futures ?

Scopitone / Rendez-vous du labo : interroger le futur et les technologies de demain

Publié le 08/07/2019

Cette année à Scopitone, les Rendez-vous du Labo présentent plusieurs temps pour échanger autour de notre vision du futur, dans une société en pleine transition. Quelles nouvelles interactions nature / humains / machines ? Quelles nouvelles technologies demain ? Ou bien, faut-il remettre en question cette "civilisation numérique" ?  

Des remises en questions qui sont d'actualité, comme le rappelle Bastien Kerspern du studio Design Friction, à l'initiative d'une table ronde et d'un atelier sur ce sujet, propices à stimuler la réflexion, la discussion et de nouveaux imaginaires : 

"Depuis quelques dizaines d’années, un ensemble de futurs promis et assénés, semble avoir été tout bonnement annulé. Voitures volantes, immersion constante dans la réalité virtuelle, maison entièrement connectée, tous ces futurs restent aujourd’hui finalement balbutiants, et peu de monde les adopte.
Il s’agit, en fin de compte, d'invitations urgentes à comprendre ce qui façonne nos imaginaires et conditionne notre vision du futur. Pourquoi tournons-nous en boucle autour d’un seul et même horizon futuriste, autour des mêmes chimères technologiques ou idéologiques, là où les urgences écologiques et sociales – pour ne citer qu’elles – nous pressent de renouveler radicalement notre vision du futur afin d’espérer des lendemains préférables ? En trame de fond, un objectif commun : se jouer des codes éculés de futurs maintes fois servis pour mieux déjouer les œillères qui sont trop souvent imposés à nos imaginaires du futur." 


LES ÉVÉNEMENTS

Table ronde “Future / Imaginary” (en anglais - par le studio Design Friction)
Ven 13/06 – 10H > 12H

Comment les imaginaires, qu’ils soient portés par la science-fiction ou par les discours de l’innovation, façonnent-ils nos visions des futurs ? Comment ces visions orientent-elles nos actions et nos décisions aujourd’hui ? Cette conférence, qui oscille entre imaginaires à venir et lendemains fantasmés, est l’occasion d’interroger nos attentes et nos représentations des futurs, qu’ils soient désirés ou qu’ils s’imposent à nous. Trois intervenants confrontent tour à tour leur pensée aux visions occidentales pour imaginer d’autres futurs.

 

Conférences "Alternative interactions" avec David Bowen & Andreas Lutz (en anglais)
Nouvelles interactions entre humains, nature et technologie
Ven 13/09 – 14H30 > 16H30

À travers le regard de deux artistes programmés sur le festival, cette conférence en deux temps propose une exploration de la notion d’« interactions alternatives », c'est-à-dire la manière d'imaginer des formes d'interaction différentes entre la technologie et la nature, ou la technologie et les humains.

 

Table ronde "La tech a-t-elle un avenir ?" (en partenariat avec usbek & rica)
Ven 13/09 – 16H30 > 18H

La Silicon Valley nous vend un futur où la technologie sera partout. Et s’il en allait autrement ? Depuis dix ans, la technologie a radicalement changé nos vies. Pourtant, de plus en plus de voix s'élèvent contre cette société du tout-connecté qui se préparerait : prise de conscience d'une pollution mentale liée au numérique, remise en cause de l'hégémonie des GAFA et de leur politique vis-à-vis de nos données. À cela s’ajoutent l'épuisement des ressources essentielles à la fabrication des outils tech et la fin de l'énergie bon marché. Alors, la civilisation numérique ne serait-elle pas qu'une parenthèse de l'Histoire ?

 

Atelier "Germaginaire" (par le studio Design Friction)
Sam 14/09 – 14H > 17H
 

Qu’on le veuille ou non, l’évocation du “futur” fait naître dans nos esprits des images plus ou moins nettes, qu’on prend le temps de remettre en question, ou pas. Comment se forment ces visions du futur ? Qui les impulse et pourquoi ? Comment les nourrit-on ? Nous enferment-elles ? À qui profitent-elles ? L’entreprise (fictive) Germaginaire dispose d’un stand pour vous présenter son activité de « façonnage d’imaginaires ». Un prétexte à la discussion, une expérience de design fiction qui stimule l’esprit critique et invite au débat.

 

 

Retour sur le workshop « Données situées et Cartographie sensible » par la Revue Sur-Mesure

Publié le 05/07/2019

À partir de cartographies sensibles de l’Île de Nantes réalisées lors d’un précédent atelier et de données collectées dans le quartier, le workshop "donnée situées et cartographie sensible" du 6 au 7 décembre 2018, proposait aux participants de s’emparer d’une boîte à outils numérique et analogique composée de capteurs, d’applications embarqués et de bouts de code préparés pour l’occasion pour créer des cartographies urbaines originales. Organisé dans le cadre du cycle thématique "Ville (in)visible", en partenariat avec la Revue Sur-Mesure, ce workshop était l'occasion de rapprocher urbanisme et design, en faisant appel aux designers Louis Eveillard et Quentin Lefevre. Retrouvez dans la Revue Sur-Mesure une synthèse de ces deux jours, accompagnée du livret complet de la démarche avec ses résultats.

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