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Labo Arts & Techs

Jeu vidéo, la conquête d’un nouveau média

Publié le 08/02/2018

Aujourd’hui dans la force de l’âge, le jeu vidéo est encore perçu comme un jeune média fougueux, parfois turbulent et immature à ses heures. Le premier jeu vidéo voit pourtant le jour en 1952 dans le cadre d’une expérimentation scientifique, couplée à un désir récréatif.

Son évolution restera liée aux innovations technologiques.
Habile et agile, le jeu vidéo n’a cessé de se mouvoir et de répondre à des attentes et des publics multiples. En salle d’arcade, dans le salon et désormais à l’école ou au bureau… Sa pratique a conquis petit à petit diverses tranches de la population jusqu’à devenir un média adopté par tous.


L’ère du geek

La démocratisation du média auprès du grand public commence dans les salles d’arcades dans les années 1970. Les ordinateurs personnels et consoles de jeu de salon permettent ensuite aux joueurs de profiter plus facilement et plus longtemps des jeux vidéo disponibles.

L’attrait pour ces activités informatiques et cette nouvelle passion forgée autour de la pratique assidue du jeu vidéo marque la naissance de la sous-culture du geek dans les années 1980. Le geek devient un important consommateur de jeu vidéo, mais un consommateur marginalisé.


Le jeu vidéo, le médium des enfants ?

Le jeu électronique est toutefois une pratique de plus en plus étendue et continue de séduire une large population. Déjà en 1980, les campagnes de pub de Nintendo pour la Game & Watch visaient les jeunes joueurs, véhiculant le cliché selon lequel le jeu vidéo est une activité réservée à l’enfance, dont il faut se débarrasser à l’âge adulte.

 

Une vision occidentale qui n’est pas partagée dans d’autres pays : au Japon, la console portable devient une véritable institution. Nintendo continue de parfaire ses machines nomades, d’y intégrer des fonctionnalités axées sur le partage communautaire et la rencontre de nouveaux joueurs.

 


Nous sommes (presque) tous des joueurs

Les innovations technologiques donnent ensuite naissance au smartphone avec la commercialisation de l’iPhone en 2007, accompagné par l’ouverture de plateformes d’applications et la création de jeux en adéquation avec les usages modernes. Parmi eux, on se souviendra d’Angry Birds, un des plus gros succès du genre.

C’est aussi dans les années 2000 que le modèle économique du free-to-play fait son apparition, répondant aux nouveaux modes de consommation : des parties rapides, composées de micro-transactions pour les moins patients. Aujourd’hui, la segmentation entre geeks, “gamers” et les autres n’a plus lieu d’être : l’adepte de Candy Crush est autant joueur que le passionné de League of Legends ou FIFA.


Pour un jeu vidéo éducatif, thérapeutique et culturel

Aujourd’hui le jeu vidéo atteint un nouveau pallier dans lequel sa forme interactive et ludique est analysée pour en tirer tous les bénéfices : s’il marque autant ses adeptes, pourquoi ne pas l’appliquer dans le cadre du travail, de l’éducation ou dans le domaine thérapeutique ? Homme, femme, enfant, senior, handicapé… De multiples expériences vidéoludiques existent pour tous les publics.

On parle aujourd’hui de “gamification” du milieu du travail afin de motiver les employés. Minecraft est également utilisé à l’école pour diverses matières comme la technologie. Le jeu vidéo répond aujourd’hui à une large palette d’usages et ne cesse de dévoiler ses richesses au plus grand nombre.

Article écrit par Cyrielle Maurice


Alors (presque) tous des joueurs ? Rendez-vous à la conférence jeu vidéo x société le 22 février pour en parler de vive voix ! 


En une quarantaine d'années, le jeu vidéo est devenu un véritable phénomène culturel, jusqu'à intégrer la sphère artistique, sociale et éducative. En dépassant la pratique consumériste et simplement ludique du jeu vidéo, Stereolux propose une série de rendez-vous : exposition, concerts, performances, game jam, conférences, ateliers… Autant d’événements permettant de se confronter à cet univers familier autrement que depuis son canapé ?!

LES EVENEMENTS

Février > Juin                            Cycle Jeu vidéo x Société x Art x Indépendant

(Pros)                                            Conférences, workshops, tables rondes, atelier d’idéation                       

Du 15 Mars au 8 Avril            Exposition Oujevipo³ 
(Tout public à partir de 6 ans)      Une approche du jeu vidéo alternatif et indépendant

Du 6 au 8 Avril                         Stereogame : week-end jeu vidéo
(Tout public)                                  Concerts, performances, game jam, exposition

Mars > Mai                               Action culturelle
(Habitants, Scolaires)                   Play-Lux, un jeu d’ar[t]cade grandeur nature

utop/dystop(IA) : quand le design fiction interroge l’intelligence artificielle

Publié le 25/01/2018

Dans le cadre du cycle consacré à la thématique « Art, Design et Intelligence Artificielle », le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux a mené, depuis septembre 2017, un projet nommé « utop/dystop(IA) ». En quatre étapes, ce travail prospectif, confié au Studio Design Friction, a permis d’élaborer des scenarios fictionnels qui interrogent la place des IA dans notre société et imaginent comment celles-ci pourraient s’y matérialiser.

Ce projet « utop/dystop(IA) » cherche à mettre en débat les enjeux économiques, sociaux et culturels de l’intégration de l’intelligence artificielle à notre quotidien. Cette approche, résolument prospective, vise à susciter des discussions permettant d’explorer les perspectives préférables à donner à un recours usuel et banalisé à l’intelligence artificielle.

La démarche utilisée tout au long de ce projet est celle du design fiction. Il s’agit d’une approche du design qui imagine et conçoit des objets fictionnels servant de support à la réflexion et à la discussion. Ces produits ou services n’ont pas vocation à être mis sur le marché, mais bien à provoquer des questionnements, des problématiques ou des critiques.

L’enjeu est également de confronter des usagers à des scénarios de design fiction mettant en œuvre des éléments d’intelligence artificielle afin de provoquer des réactions et un débat susceptibles d’enrichir les démarches d’innovation et de prospective des acteurs impliqués dans ce champ.

Retrouvez ici le film retraçant les différentes étapes du projet « utop/dystop(IA) » ainsi qu’une selection de scenarios qui en sont issus :

 

Réalisation : Hiboo Films

Le Laboratoire Arts et Technologies de Stereolux est un espace dédié à l’expérimentation se situant à la jonction des arts numériques, de la recherche et de l'industrie. Il cherche à promouvoir et accompagner les transitions technologiques, d’usages ou culturelles. Il contribue ainsi activement aux multiples réflexions autour des technologies numériques et de leur devenir.
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Le Studio Design Friction explore par le design les enjeux liés aux transformations sociales, culturelles et technologiques que connaissent nos sociétés. Composé de designers, il se penche sur des problèmes socio-économiques et tente aussi bien de les cerner que d’y répondre. Il produit ainsi des scénarios critiques et spéculatifs à travers une démarche ouverte et participative afin d’adresser ces controverses naissantes à un public qui n’y est pas encore sensibilisé. Les productions qui en découlent visent à construire un esprit critique et nourrir le débat autour de ces thématiques amenées à façonner le futur.
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CYCLE IA : retour sur le Workshop Machine Jacking

Publié le 04/01/2018

Ce workshop, animé par le studio de design Chevalvert les 30 novembre et 1er décembre 2017, avait pour objectif de détourner, hacker, jacker des IA afin de les utiliser comme un outil de génération graphique, différent de ce pour quoi elles avaient été prévues et programmées initialement.

Une série de données amenées par les participants (images, textes, etc.) a été manipulée par une intelligence artificielle (chatbot, assistant personnel, analyse de texte, etc.), ce qui a fourni un ensemble de résultats utilisés ensuite comme matière première pour générer des productions graphiques.

Une seule règle devait être respectée : détourner, hacker des AI.
La production graphique ne devait ainsi pas avoir de lien direct avec le système AI que le participant avait sélectionné. Au contraire, ce système devait être utilisé pour composer / générer quelque chose de différent de ce pour quoi il avait été conçu. 

A travers cette présentation, découvrez les différents systèmes intelligents hackés et les compositions graphiques ainsi générées par les participants. 

Cycle IA : Retour sur la journée thématique "CRÉATIVITÉ ET ÉMOTIONS A L'HEURE DE L'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE"

Publié le 03/01/2018

Organisé  le 13 décembre 2017, cet événement s’adressait aux entreprises du secteur du numérique et de la communication (grands groupes, PME, start-ups...), aux chercheurs ainsi qu’aux artistes et designers intéressés par la façon dont les thématiques de l'émotion et de la créativité s'articulent avec la question de l'intelligence artificielle. Cette journée a été pensée comme un temps de rencontres et d’échanges entre professionnels, permettant de croiser réflexions, approches et travaux.

LA MATINÉE a été consacrée aux keynotes et tables rondes sur les thématiques de l’intelligence artificielle, de la créativité et de l’émotion.

1ÈRE PARTIE : INTELLIGENCE ARTIFICIELLE & CRÉATIVITÉ

Avec :

2ÈME PARTIE : INTELLIGENCE ARTIFICIELLE & ÉMOTIONS

Avec :

  • Filipe Vilas Boas, artiste
  • Emilie Poirson, maître de conférence en informatique à Centrale Nantes / LS2N
  • Julien Pierre, enseignant chercheur en sciences de l’information et de la communication à Audencia (modérateur)
  • Jean Marc Diverrez, Ingénieur de Recherche et Responsable de projetIRT b<>com

UN ESPACE DE DÉMONSTRATIONS rassemblait différents projets, artistiques, de design ou industriels et a permis d'échanger avec les porteurs de projets présents. 

Projets présentés :

  


L'APRÈS-MIDI les participants ont pu rejoindre un des trois ateliers thématiques proposés 

  • Atelier #1 Totem et Tabou : un atelier de construction et déconstruction permettant d'explorer et de discuter toute l'ambiguïté de notre rapport au progrès et à la technologie.
    Animé par Julien Pierre, enseignant chercheur en sciences de l’information et de la communication à Audencia

  

 

  • Atelier #2 Le micro-atelier Design Friction s’inscrivait dans la continuité de l’atelier utop/dystop(IA) et proposait d’imaginer et de construire de nouveaux récits sous forme de design fictions liées aux futurs inattendus de l’IA.
    Animé par le studio Design Friction

    > Scénario 1 : dans un monde où "Assistant Life" nous souffle la bonne conduite, des "Piments" viennent épicer nos vies...

     

      


    > Scénario 2 : face aux fake news, une IA pour nous aider à distinguer le vrai du faux... "Don't lie, Verity is watching !" Mais peut-on lui faire confiance ? 

     



    > Scénario 3 : "L'empathisateur" nous permet de faire ressentir les émotions de son interlocuteur. Face à son succès, naissent des brouilleurs DIY pour renouer avec la vraie communication interpersonnelle... 



     

 

  • Atelier #3 Reboot Camp pour questionner les capacités d’une IA à capter et « téléporter » des émotions à distance
    Atelier participatif animé par Nadine Hervé, formatrice en méthodes et techniques de créativité

     




     

Organisé en partenariat avec La Cantine et Images & Réseaux

  

Art Machine : Spectacle vivant et industrie

Publié le 31/12/2017

Robots, imprimantes 3D, drones, exosquelette, la machine industrielle s’invite de plus en plus couramment dans l’art et le spectacle vivant. Sur les planches, dans les musées, dans le domaine de la performance, ces outils conçus dans le but de fabriquer des produits à la chaîne s’emparent de nos émotions et deviennent les véhicules d’une narration théâtrale, philosophique, poétique. Qui sont les artistes qui misent sur le croisement de l’art et de l’industrie ? Qu'est-ce que ces détournements d’usages disent de notre époque et de notre culture ? Comment cela influence-t-il la production de spectacle ? Quelques réponses dans ce panorama de l’“art machine”.


Inferno - Photo © ELEKTRA-Gridspace

Alors que les machines s’imposent dorénavant naturellement dans nos vies par le biais de l’informatique omniprésente (ordinateurs, mais aussi Smartphones, objets connectés, jouets), ce sont aujourd’hui les machines industrielles, parfois imposantes et généralement assignées à des tâches précises par l’industrie, qui s’invitent au spectacle et dans le spectacle. Machines humanoïdes ou inquiétantes d’étrangeté, elles sont le symbole des défis futurs avec lesquels le genre humain va devoir négocier pour préserver ce qui fait son humanité : empathie, émotion, créativité. De plus en plus souvent inclue comme actrice et participante à part entière, la machine s’humanise, danse, prend la pose, écrit et récite du texte théâtral, fait des pirouettes et séduit le public.

Mais son intégration dans les faits est-elle aussi facile qu’il y paraît ? Notre rapport à la machine, mais également à l’humain contemporain dont le corps se mécanise de plus en plus, est tout à la fois emprunt de fascination, de compétition et parfois de répulsion. L’outil intelligent, ou pas, est ce qui restera quand nous aurons disparu (et c’est toute la question d’Artefact, la pièce de Joris Mathieu dont nous parlerons plus loin). Elle est à notre service sans âme ni conscience. Ou bien nous trompons-nous ? Créée par l’humain, est-elle plus humaine que nous le pensons ? Intéressante question grâce à laquelle, en plus d’être ce formidable outil de narration et de scénographie, la machine entre de plain-pied dans notre mythologie contemporaine (via la science-fiction, entre autre). Et certains s’emparent de ces mythes modernes pour prendre à rebrousse poil le mythe de la machine infaillible et implacable, rendue ici sensible, poétique, et même émouvante, par la magie de l’art.

La machine dans le spectacle vivant

L’utilisation de machines en art, et plus particulièrement dans le spectacle, n’est pas nouvelle. Le futurisme italien et son pendant russe glorifiaient déjà l’arrivée de la machine et prônaient son utilisation dans l’art dès les années 1900, au théâtre comme dans les arts plastiques. Le terme “robot” est d’ailleurs né au théâtre en 1920, sous la plume du dramaturge tchèque Karel Capek dans sa pièce R.U.R. (pour “Rossum Universal Robot”). Les années 50’, folles d’innovations, de design et de vitesse, portent en elles le germe de la modernité que nous vivons aujourd’hui, et les studios d’Hollywood abreuvent le public de robots et autres machines étranges provoquant diverses mutations. Dans les très technocrates années 60’, impossible de ne pas nommer l’œuvre du fameux artiste vidéo Nam June Paik et son totem robotique (Robot K-456, 1964), Norman White, pionnier de l’art génératif qui détourne des circuits imprimés pour First Tighten Up on the Drums (1967) ou encore au cinéma le fabuleux Playtime du Français Jacques Tati (1967) qui influence encore aujourd’hui de nombreux réalisateurs et metteurs en scène dans le monde. Les enjeux, pourtant, sont différents. Qu’il s’agisse d’une glorification ou d’une mise en garde, quand l’art s’emparait de la machine, il s’agissait alors le plus souvent d’un artefact unique, un robot censé incarner des valeurs humaines (comme Robby, le robot protecteur de Planète interdite (1956) ou HAL dans 2001, l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick). Aujourd’hui, il est question de faire entrer des machines industrielles ou “professionnelles”, dans ce que le philosophe Peter Sloterdijk nomme le “parc humain”(1) mais aussi son imaginaire. C’est une nouvelle révolution artistique et esthétique.

Industrie lourde & industrie du spectacle

Les enjeux de ce croisement entre outils industriels (notamment les outils assez “lourds”, type bras robotiques et autres machines automatisées d’usinage) et création artistique, sont multiples et passionnants. Des métiers se créent de fait, adaptant la machinerie théâtrale à l’air du temps et aux techniques de l’époque. La technologie, [nous l’avons cité (voir notre dossier en trois parties “La réalité virtuelle et ses applications dans le spectacle vivant”)], fait partie intégrante du processus de création, en musique, au théâtre, en danse, au cinéma bien sûr, et même dans les arts plastiques. Pour autant, l’utilisation de machines lourdes et techniquement définies comme productrices de biens de consommation ou d’autres machines (automobiles, avions, électroménager) est une nouveauté. Pour ce faire, il a fallu détourner toute cette mécanique de son usage premier.

C’est la tâche à laquelle s’est attelé Clément-Marie Mathieu, fondateur du LIE (Laboratoire de l’inquiétante étrangeté) en région Rhône-Alpes. Ce musicien de formation diplômé de l’ENSATT, auteur d’un mémoire sur les interfaces homme-machine en musique, également régisseur son, participe à l’intégration d’anciens robots industriels au sein de pièces de théâtre et de spectacles divers, mais aussi d’entreprises. Accompagné de son ami et collaborateur Patrice Bouteille de Robotique Concept(2) (société de recyclage de robots d’occasion ou neufs à destination des petites ou moyennes entreprises), il achète, vend et loue ces machines aux compagnies de spectacle vivant. De par leur expérience, les deux collaborateurs sont conscients du sentiment étrange qui peut lier l’homme et la machine. L’empathie, l’attachement ou la répulsion éprouvés par l’humain face à son compagnon mécanique est une des bases de leur passion pour ce métier, tout comme ces sentiments sont sources de fascination pour les artistes.

Machinerie théâtrale et débat éthique

Le théâtre, on le sait, est un lieu de constante expérimentation technique. L’utilisation fréquente et expérimentale de techniques émergentes au cours de son histoire est la preuve d’une volonté continue d’intégrer l’innovation technologique. De plus, l’intégration de nouvelles techniques est également un gage d’évolution des écritures, ainsi que le reflet d’une évolution sociale. Le fait que des machines soient implicitement inscrites dans l’évolution d’une pratique artistique au même titre que les humains dont c’est le métier (metteurs en scène, régisseurs techniques, ...) est le signe d’une évolution culturelle autant que technique ou esthétique. C’est tout le propos d’Artefact, objet théâtral hybride créé par Joris Mathieu, metteur en scène au sein de la Cie Haut et Court et directeur du Théâtre Nouvelle à Lyon, et Nicolas Boudier, scénographe.

Cette pièce-installation pour deux imprimantes 3D et un bras robotique industriel se vit comme une petite révolution dans une discipline pourtant ouverte aux évolutions techniques. Artefact est une “pièce” présentée sous forme de parcours en trois actes qui se visite comme un musée et initie une réflexion à la fois philosophique, éthique et artistique profonde sur la place de la technologie dans la création contemporaine. Pour Nicolas Boudier, “il y a toujours eu dans le regard scénographique, deux grandes directions, dont l’une était l’interrogation des nouveaux outils et des nouvelles technologies (le théâtre optique, la vidéo, ...), qui font également avancer notre pratique et nous permettent de créer de nouvelles formes, mais toujours avec une conscience de l’héritage de la machinerie traditionnelle. Avec ces nouveaux outils, nous nous réapproprions des techniques anciennes, qui pour certaines, datent du théâtre de Shakespeare, et nous les réintégrons en additionnant à ces effets-là des outils modernes comme la vidéo ou le vivant”. Dans son utilisation de machines industrielles basiques, mais également dans le choix d’une scénographie déshumanisée, Artefact utilise ces réflexions sur la machinerie théâtrale pour évoquer aussi la question du devenir du genre humain à une époque où celui-ci donne l’impression d’organiser son propre remplacement. À ce titre, cette œuvre inclassable est exemplaire (même au regard d’autres propositions comme le Sans Objet d’Aurélien Bory), à la fois des questions qui parcourent le spectacle vivant d’aujourd’hui en matière d’usage des technologies, mais aussi des grandes questions philosophiques de notre temps. (À noter que Sans Objet, comme Artefact, ont bénéficiés des conseils et du savoir de Clément-Marie Mathieu et de l’équipe de Robotique Concept).

Dialogue artistique homme-machine

  • Les arts numériques

Voila un moment que la machine s’est invitée dans ce que l’on nomme les “arts numériques” (ou “art contemporain numérique”), terme définissant les activités artistiques faisant appel à l’informatique, le code, et par extension, l’interactivité, les scénographies lumineuses gérées informatiquement, la robotique, ou plus généralement, qui célèbrent le croisement fécond des sciences, de l’ingénierie et de l’art. Dans ce domaine, l’usage de la robotique industrielle, de l’imprimante 3D ou de drones est désormais courant. En matière d’usage singulier de machinerie d’usinage, on peut citer Bios [bible] du collectif allemand de Robotlab, dont le principe tient dans l’utilisation d’un énorme bras robotique d’usine qui recopie la Bible dans le style calligraphique enluminé des moines copistes du Moyen Âge, unissant brutalité mécanique et finesse de la reproduction : “Et soudain, comme par miracle, une émotion naît !”. Dans un style proche, il faut également connaître les séries Human Study (2013) et Human Traits (2015) de Patrick Tresset qui placent le public en situation de modèle pour une classe très appliquée “d’élèves robots” qui vous tirent le portrait. Dans le domaine de la performance, citons l’impressionnant Inferno des artistes Bill Vorn et Louis-Philippe Demers, une œuvre participative aussi émotionnellement que physiquement éprouvante qui met en scène une vingtaine (parfois plus) d’exosquelettes tout droit sortis d’un film de science-fiction.

Cette performance très physique invite le spectateur à enfiler ces structures mécaniques d’environ 20 kg qui recouvrent le haut du corps (épaules, taille et bras). Chaque partie de sa structure est commandée par les artistes durant la performance qui tient tout autant de la rave party robotique que d’un système de soumission proche de la claustration sado-maso. Une expérience mystique d’emprisonnement et de subordination à la puissance de la machine incarnée dans une performance de près de quarante minutes !

  • Théâtre / Danse

Au théâtre, l’utilisation de robots est-elle la marque d’une mainmise technicienne sur la représentation au profit d’un metteur en scène ou s’agit-il, au contraire, d’un dialogue expérimental et fécond entre l’homme et la machine ? Dans Artefact, on l’a vu, le propos désigne clairement la seconde affirmation. C’est aussi le cas de La Métamorphose, une adaptation de la célèbre nouvelle de Kafka par Oriza Hirata, un metteur en scène chez qui les robots donnent souvent la réplique aux comédiens (dans Les Trois Sœurs d’Anton Tchekhov par exemple) tout en jouant sur l’effet de gêne ressentie par l’être humain devant une machine qui lui ressemble trop. Ces robots androïdes, nommés “géminoïdes”, sont à l’origine du concept de “vallée dérangeante” (the uncanny valley) par le roboticien japonais Masahiro Mori, qui constata dans ses travaux que l’humain éprouvait moins de gêne dans sa relation au robot si celui-ci ne lui ressemble pas. Cette relation est également le sujet de son adaptation théâtrale La Métamorphose, où le personnage se transforme en robot plutôt qu’en cancrelat. Le devenir machine de l’homme est ici à nouveau questionné du point de vue de son étrangeté. Humanoïde mais clairement mécanique, à quel règne appartient-il ? Biologique ou mécanique ?

En danse nous citions Sans Objet, un spectacle d’Aurélien Bory et de la Cie 111, qui donnera plus tard l’installation du même nom. Dans le spectacle, un monstrueux bras robot industriel défie la pesanteur avec une grâce animale en offrant un spectacle de danse aérienne où le duo homme-machine se joue des idées préconçues et des genres : le débat homme-machine ici est l’occasion d’une rencontre et d’un dialogue : “Nous vivons une nouvelle ère”, annonce le texte de présentation de la Cie 111, “où la relation entre l’être humain et la technologie se déploie considérablement. Là où il existait une frontière indiscutable, claire, connue de tous, à savoir celle entre l’inerte et le vivant, on voit apparaître une zone de latence, dominée par deux questions qui s’opposent. Le vivant va-t-il étendre son territoire dans la machine, ou est-ce la technologie elle-même qui gagnera le terrain du vivant ? Le dialogue entre l’homme et la machine est de plus en plus profond, complexe. La compétition est inévitable”. Avec Sans Objet, l’art se pose en observateur concerné de son époque et de son rapport aux machines. Il ne s’agit pas d’une compétition, ni d’un objet de répulsion. C’est aussi le propos de la plupart des chorégraphes qui ont réalisé des spectacles avec des robots depuis quelques années. Dans la catégorie “robot de compagnie”, on ne peut nier le succès de Nao, le petit robot humanoïde conçu par Aldebaran Robotics. Avec Robot de Blanca Li (2013), nous sommes également conviés à un dialogue inter-espèces. Un échange qui se base sur le langage du corps cette fois. Nao ayant tous les attributs physiques d’un humain, peut-on le faire bouger comme un danseur. C’est ce qu’arrive assez bien à faire Blanca Li, ses huit danseurs et sept Nao (qui partagent la scène avec les étranges machines musicales de Maywa Denki). De son côté, le chorégraphe Éric Minh Cuong Castaing utilise également des robots Nao accompagnant deux danseurs, et des enfants, pour son spectacle qui questionne le futur de l’humanité, School Of Moon (2016). Pour finir ce panorama non-exhaustif, on citera Link Human/Robot d’Emmanuelle Grangier (2012 - 2015) qui utilise également un petit Nao pour illustrer la mise en forme d’un dialogue intimiste, et espérons-le, porteur d’espoir, entre l’homme et la machine.

Maxence Grugier
Article rédigé en partenariat avec le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux


(1) Peter Sloterdijk - Règles pour le parc humain, 1999
(2) www.robotiqueconcept.com société basée à Saint-Georges-de-Reneins dans le Beaujolais

 

Article publié dans la Revue AS - Actualité de la Scénographie N°216 
Le Laboratoire Arts & Technologies de Stereolux s’associe avec les Éditions AS (Actualités de la scénographie) pour une série d'articles consacrés aux technologies numériques, à l'art et au design. L'occasion de partager un point de vue original et documenté sur le futur des pratiques artistiques, en particulier dans le champ du spectacle vivant.

 

 

 

APPEL À PROJETS ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR « ARTS & TECHNOLOGIES » 2018 – ELECTRONI[K], LA GAÎTÉ LYRIQUE & STEREOLUX

Publié le 21/12/2017

En 2018, Electroni[k], Stereolux et La Gaîté Lyrique s’associent pour accompagner, soutenir et produire 3 créations mêlant Arts & Technologies.

Étudiants, proposez un projet innovant au croisement des arts et des technologies !


After Eden – Mélanie Courtinat, Iseult Perrault & Salomé Chatriot / Lauréats 2017 © Gwendal Le Flem

► Type de projets : installations immersives, installations interactives, applications iPads ou Android, contenu pour dispositif de réalité virtuelle…
► Mots-clés : croisement artistique – design – technologie – graphisme – vidéo – création sonore – réalité augmentée – réalité virtuelle – coopération – innovation
► Budget : jusqu’à 2 000 € TTC par projet (achat de matériel, temps de travail, logistique, communication).

Conditions d’éligibilité :

► Être étudiant en 2017 / 2018
► Utiliser ou détourner une technologie ou un logiciel. Exemples : Arduino, Processing, Ableton Live, Occulus…
► Appel à projets ouverts à tous les étudiants de toutes nationalités.

Informations complémentaires :

► La faisabilité technique et budgétaire, ainsi que la capacité de diffusion sur d’autres évènements et lieux seront particulièrement observées.
► Un projet peut être porté par un ou plusieurs étudiants, et associer d’autres acteurs (artistes, partenaires…). Une équipe pluridisciplinaire est un atout pour la candidature.
► Une ou plusieurs des 3 structures associées à l’appel à projets proposeront des espaces de travail et un accompagnement (artistique, technique, logistique, conseil et aide à la structuration, communication, mise en réseaux…) en fonction du projet.

Informations à nous communiquer :

► Catégorie du projet : Installation ou application
► Coordonnées
► Projet (nom, résumé, mots-clefs)
► Lien mediafire pour télécharger un dossier au format ZIP (impératif) de taille maximum de 5 Mo, contenant : une présentation du projet, des visuels, les besoins matériels (fiche technique et budget de production) et un lien vidéo si existant.

IMPORTANT : Les projets ne respectant pas les critères indiqués précédemment ne seront pas étudiés.


Diodon – Collectif Dynamorphe / Lauréats 2017 © Gwendal Le Flem

Le(s) projet(s) retenu(s) par le comité de sélection seront accompagnés et produits jusqu’à l’automne 2018 et seront présentés lors d’un des temps forts des structures entre septembre 2018 et juin 2019.

► Electroni[k] : festival Maintenant octobre 2018
► La Gaîté Lyrique : temps fort en automne 2018
 Stereolux - festival Scopitone : du 19 au 23 septembre 2018 ou pendant la saison culturelle de Stereolux d’octobre 2018 à juin 2019

En cas de sélection, les porteurs de projets s’engagent à être disponibles sur le temps de présentation et d’accompagnement de leur création. Ils peuvent également être invités à présenter leur création dans le cadre de rencontres, tables rondes ou conférences.

Date limite de candidature : 15 février à minuit

CANDIDATEZ ! 

 

CYCLE IA : RETOUR SUR LA CONFÉRENCE "Quel futur pour l'IA ?"

Publié le 20/12/2017

En conclusion du cycle, cette conférence du 14 décembre 2017 aborde les développements à venir de l’intelligence artificielle, aussi bien au niveau technologique que créatif.

Une première intervention propose un regard prospectif sur les développements technologiques et scientifiques à venir dans le champ de l’intelligence artificielle, et les problématiques techniques et conceptuelles qu’ils poseront. Elle présente les futures évolutions de ces technologies, et ouvrira de nouvelles pistes de réflexions sur le devenir de l’intelligence artificielle, de ses applications et de ses impacts.

Une deuxième intervention aborde les évolutions à venir dans le champ de l’art et du design, en lien avec les évolutions de l’intelligence artificielle prévues dans un futur proche. Elle permet de revenir sur les principaux enjeux abordés pendant le cycle, et d’esquisser de nouvelles formes d’interactions entre artistes, designers, intelligences artificielles et publics.

Intervenants
Florian Richoux, maître de conférence à l’Université de Nantes (Laboratoire LS2N)
Sylvie Tissot, informaticienne (intervention annulée pour raisons de santé)

Avec le soutien du Laboratoire des Sciences du Numérique de Nantes de l’Université de Nantes

 

 

CYCLE IA : RETOUR SUR LA CONFÉRENCE “L' Imagination artificielle”

Publié le 14/12/2017

Cette conférence,  programmée mercredi 6 décembre 2017, a pour objectifs de décrypter ce qu'implique (ou n'implique pas) l'apparition d'outils technologiques utilisant des éléments d'intelligence artificielle par rapport aux pratiques artistiques actuelles ou futures, et d'analyser en retour comment les questionnements et les apports conceptuels amenés par les artistes peuvent enrichir les réflexions actuelles autour de l'intelligence artificielle.
Elle aborde la notion d’imagination artificielle, c’est-à-dire la faculté des machines à produire des images. Cette capacité nouvelles des machines à générer des flux de médias de manière autonome bouleverse notre propre rapport à l’imagination et à l’esthétique, et questionne la façon dont ces deux notions sont influencées par les technologies que nous produisons.

Intervenants
Grégory Chatonksy, artiste
Manuela de Barros, maître de conférence en philosophie, esthétique et théories des arts, Université Paris 8

 

 

Design Friction : Les fictions du design autour de l’intelligence artificielle, par Digitalarti

Publié le 30/11/2017

Rencontre avec le studio Design Friction avant la restitution du projet utop/dystop(IA) le 24 janvier prochain

Digitalarti, partenaire du cycle thématique "Art, design et intelligence artificielle", a rencontré le studio Design Friction qui porte le projet collaboratif "utop/dystop(IA)". Commandité par le Labo Arts & Techs de Stereolux, il a pour objectif d’imaginer et de questionner les différents enjeux économiques, sociaux et culturels de l’arrivée de l’intelligence artificielle dans notre quotidien. Vaste sujet !

Après un atelier d'idéation le 18 novembre 2017, et un atelier pour proposer des contre-récits le 13 décembre 2017 lors de la journée thématique, les résultats de ce projet seront présentés le 24 janvier 2018. Pour nous faire patienter, rencontre avec Design Friction, laboratoire de « speculative design ».

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Cycle IA : Retour sur la conférence “Design et Intelligence Artificielle”

Publié le 29/11/2017

L'exploration de l'Intelligence Artificielle se poursuit, cette fois centrée sur la sphère du design lors d'une conférence dédiée, programmée jeudi 23 novembre 2017 en salle Maxi. Professionnel et enseignant abordent le développement et le déploiement de produits intégrant des éléments d’intelligence artificielle, questionnant de manière directe les relations entre utilisateurs et objets technologiques et soulevant des enjeux nouveaux en termes de design et de conception, aussi bien au niveau des pratiques des designers que de leurs impacts humains et éthiques.

Quels rôles les designers jouent-ils dans cette démocratisation de l’intelligence artificielle ? Comment peuvent-ils contribuer au développement de technologies porteuses de progrès social et humain ? En quoi l’intelligence artificielle questionne-t-elle les pratiques actuelles des designers ?

Intervenants​
Jean-Louis Fréchin, designer et fondateur de l’agence NoDesign
Daniel Gaffner, enseignant en design graphique à l’Université de Malmö (intervention en anglais)


Événement organisé en partenariat avec l’École de Design Nantes Atlantique