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Scopitone : Voyages visuels et sonores avec Molecule (interview)

Musique Publié le 16/07/2019

Molecule ne cesse d'expérimenter des formes hybrides et innovantes, à l'image de Scopitone qui a profité des nouvelles possibilités qu'offre cette édition pour l'inviter sur plusieurs temps et lui donner les clés d'un espace immersif. Entre un live avec des vidéos 360°, un autre dans le noir en son spatialisé et une masterclass sur son travail, nul doute qu'il nous transportera tous de l'ancien MiN de Nantes au coeur des glaciers du Groenland. 
 

-22,7°c est une extension live de votre épopée au Groenland, pouvez-vous revenir sur votre processus de création, aussi bien CONCERNANT la composition sonore que les images projetées à 360° ? 

Je suis parti un mois et demi avec le vidéaste Vincent Bonnemazou et mes micros dans un village inuit au Groenland. J’ai fait beaucoup de prises de sons in situ et j'ai composé des morceaux à partir de ces sons.
 


J’ai repris le même processus de création que pour 60° 43' Nord. J’étais parti cette fois sur un bateau pendant plus d’un mois, sans escale, en plein milieu de l’atlantique, avec l’idée de mettre en musique la tempête.  

Tous les morceaux des albums sont à chaque fois composés entièrement sur place. Quand je reviens, il ne reste plus que le mastering, la dernière étape, pour être sûrs que les titres sonnent pareil sur à peu près tous les systèmes. Mais il n’y a aucune note de rajoutée.

 

 

Comment retranscrivez-vous ensuite ce voyage en live ? 

L’idée du live est de réinterpréter les morceaux de l’album avec les instruments que j’avais au Groenland. Sur scène, j’utilise à la fois des prises de sons faites au Groenland, des trames des morceaux des albums et puis, selon les inspirations du moment, je compose en improvisant. 
Chaque live est donc unique, avec une trame commune, une base dont je me sers pour retomber sur mes pattes. C’est une succession d’allers-retours entre des choses pré-écrites et des improvisations. 
Le spectacle a aussi tout un côté visuel. Toute la matière vidéo provient des images tournées au Groenland par Vincent Bonnemazou. Mais -22,7°c ne se joue pas systématiquement avec un dispositif 360°. Nous avons réalisé la série 360° seulement en avril dernier pour un concert à la Gaité Lyrique. A Scopitone ce sera la 3ème et 4ème fois qu’on jouera le live sous cette forme. 
 

Vous étiez déjà venu à Scopitone en 2016 pour jouer un live 360°dans la salle Maxi de Stereolux. vous revenez pour jouer cette fois dans l’ancien MiN de Nantes avant sa destruction, dans un environnement bétonné, industriel. Êtes-vous impacté par le lieu dans lequel vous jouez ? 

Oui bien sûr, par le lieu et le public. L’aspect scénographique est aussi une forme de collaboration avec le festival qui met en place ce système de diffusion et de projection. Je suis assez sensible à ce que peut dégager chaque lieu, j’essaie d’être un maximum à l’écoute du public, en proposant un voyage collectif pour partir ensemble dans des contrées lointaines. 
 

 

Vous proposez un autre voyage à Scopitone, intérieur cette fois, avec Acousmatic 360° dans le noir, en son spatialisé. Pouvez-vous revenir sur le dispositif technologique déployé pour ce live ? En quoi ces deux lives sont-ils complémentaires ? 

Acousmatic 360° se fonde sur un concept qui est vraiment à l’opposé du live vidéo -22,7° puisque je plonge dans le noir le public qui est entouré d’un système de diffusion spatialisé, donc au coeur du son. L’idée est de mettre en avant la sensation d’écoute et les effets de spatialisation. C’est un live qu’on a élaboré avec Hervé Déjardin, ingénieur spécialiste en spatialisation à Radio France, avec qui je collabore depuis des années. On a mis ce live au point une première fois pour jouer au Rex l’année dernière. Ce fut un moment assez inoubliable et étonnant. On s'est dit qu’on ne pouvait pas s’arrêter là, alors on a décidé de partir en tournée avec ce projet. 

C’est une proposition qui va donc à l'opposé de -22,7° dans la sensation que le public peut avoir, malgré le fait que les propositions musicales des deux lives se fondent sur le même projet. Pour Acousmatic 360° je pars de la trame de -22,7° en proposant un live qui s’étire beaucoup plus pour laisser place à la spatialisation. L’échange, l’expérience est très différente. 

Très concrètement, j’envoie chacune de mes pistes séparées à Hervé Déjardin, positionné au milieu du public. Il crée alors des mouvements en temps réel avec ces sons et j’interagis sur ces mouvements. Il y a une vraie interaction entre nous. C’est une expérience très sensorielle, qui est à la fois collective et intime. Je ressens le public, on est tous au coeur du son. Il y a quelque chose de très fort, même plus fort qu’avec un live 360°visuel où le public évidemment écoute, vie la musique, mais est aussi captivé par la vue et les images. 
 

 

Vous partagez aussi votre travail lors d’une masterclass, comment appréhendez-vous ces échanges avec le public ? 

J’aime à la fois les aventures très solitaires, assez extrêmes et la tournée qui suit ces aventures. Ces moments d'échanges permettent de reprendre de la force pour mieux repartir. Ce sont des expériences très complémentaires. Le partage d’un point de vue pédagogique est aussi toujours enrichissant. Je vais axer cette masterclass sur le travail d’enregistrement en montrant comment composer de la musique à partir du son du réel. L’idée est de partager le coeur de ma démarche.