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TEMPS SUSPENDU AVEC TRISTAN MENEZ (INTERVIEW)

Arts numériques Publié le 25/05/2022

Après bloom, l'artiste numérique Tristan Ménez présentera dans nos murs sa nouvelle exposition, Pulse, du 9 juin au 26 juin. Par ses installations de fontaine, ses ondes vibratoires et ses fréquences de lumière, l'artiste tente de suspendre le temps en rendant inerte la matière liquide, capturée par la lumière, hypnotisée par le son. 

Nous lui avons posé quelques questions.

Le vernissage de Pulse aura lieu le 8 juin dans nos murs. A cette occasion, Tristan Ménez et Benjamin Le Baron réaliseront leur performance, Instabilités : un live fascinant, fait de musiques abstraites et d’encres colorées facétieuses.

PULSE - TRISTAN MÉNEZ


1. Vous travaillez beaucoup sur la lumière, les ondes vibratoires en interrogeant l’espace et le temps, notamment avec l’utilisation d’effets stroboscopiques. Pourquoi portez-vous un intérêt pour ces thématiques en particulier ?

Depuis mes études en art numérique je cherche à trouver des liens intéressants entre image et son. En 2015, j'ai découvert l'expérience de Melde et je me suis rendu compte que le haut parleur était un très bon outil pour créer ce lien entre image et son. Le haut parleur produit à la fois du son et, grâce à son mouvement mécanique, a une incidence sur ce que l'on voit car il peut déplacer la matière. Le son et l'image sont alors liés par le mouvement. Pour produire des fréquences sonores, la vitesse de déplacement du haut parleur doit être très rapide. Le déplacement de la matière est alors trop rapide pour être observé à l'œil nu, et nous paraît flou. C'est là qu'intervient la stroboscopie qui permet, par une illusion d'optique, de ralentir visuellement les mouvements et ainsi d’explorer la temporalité de la matière en mouvement.

Poser son cerveau et laisser la matière en mouvement nous amener "ailleurs".

2. Que cherchez-vous comme réaction de la part de celles et ceux qui découvrent vos installations ?

Bien évidemment la surprise face à un effet surréaliste, l’eau qui semble défier la gravité. Mais aussi l’idée de la contemplation, poser son cerveau et laisser la matière en mouvement nous amener "ailleurs". Cette dernière réaction n’est pas quelque chose qui a été pensé, c’est une évidence qui est apparue lors des expérimentations. J'ai lu que l’ ”état contemplatif” était produit par des mouvements lents et répétitifs, ce qui conduit le·la regardeur·euse/observateur·ice vers un état d’hypnose, un état méditatif. Le mot “hypnotique” revient d'ailleurs très souvent lorsque les spectateur·ices décrivent les installations bloom et Pulse.

 

 

3. En 2020, vous présentiez l’exposition bloom dans nos murs, qui rendait compte des effets des ondes sonores sur une matière liquide. Cette année, à partir du 9 juin, vous nous présenterez l’exposition Pulse. Est-ce une évolution de bloom ? Comment l’avez-vous construite ? Par quelles étapes scientifiques puis artistiques êtes-vous passé ?

Oui c’est clairement une évolution du projet bloom. Je souhaitais rendre compte des autres formes que pouvaient prendre les sculptures d’eau. Je ne souhaitais pas reproduire 4 fois l'installation bloom, c’est pourquoi j'ai exploré d’autres manières de fabriquer la “machine”. Pulse m’a  permis d’explorer d’autres techniques, comme la couleur avec la lumière stroboscopique, un contrôle du flux d’eau plus précis, le “vibreur” diffuse aussi le son, etc. D’un point de vue artistique, la couleur RVB m’a fait penser aux créatures abyssales, et aux méduses fluorescentes. Les sculptures d’eau présentes dans Pulse sont issues des diverses expérimentations qui ont été réalisées pour l’installation bloom. Cette installation est amenée à évoluer au fil du temps. Je la perçois comme un instrument à expérimenter, à maîtriser.

© Lorriane Torlasco

Instabilités - Tristan Ménez & Benjamin Le Baron

4. Le vernissage de votre exposition Pulse aura lieu le 8 juin. Nous aurons le plaisir d’y voir Instabilités, une performance réalisée en collaboration avec l’artiste Benjamin Le Baron. Comment s’est passé ce travail de collaboration et qu’avez-vous apporté l’un et l’autre au résultat final ?

Bien évidemment, de la technique. Après, au niveau artistique, on avait déjà tous les deux une connaissance du média utilisé par l’autre. Benjamin avait déjà un rapport à l’image au travers de son travail dans le ciné concert, et de mon côté j’ai pratiqué la musique électronique. Je pense que c’est surtout la matière en mouvement qui nous a principalement porté et qui nous a tous les deux guidé dans la création de la performance.

Un·e artiste n’est pas forcément le·la plus à même d’exprimer ce qui le·la touche en tant que personne.

5. Vous aimez interroger et mettre en exergue le lien entre les Arts et les Sciences. Y-a-t-il de nouvelles thématiques qui vous inspirent et sur lesquelles vous souhaiteriez travailler dans vos futures œuvres ?

Il y a des thèmes de société qui m'inspirent ou qui me révoltent personnellement. J’aurai aimé par exemple, établir un discours social, au travers de mon travail, dénoncer les ravages de l’ultra capitalisme dans la société. Mais un·e artiste n’est pas forcément le·la plus à même d’exprimer ce qui le·la touche en tant que personne. Mon travail est peut-être de proposer une “pause” au·à la spectateur·ice afin de s’évader de cette réalité. C’est d'ailleurs ce qui m'a toujours attiré dans la littérature de science-fiction !