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Scopitone I Immersion sous dôme, les secrets de la tournée SAT Circuit - (Interview)

Arts numériques Publié le 10/09/2018

À quelques jours du lancement de la première tournée internationale initée par la SAT de Montréal, en coproduction avec une quinzaine de partenaires dont Stereolux/Scopitone, nous trépignons d'impatience de découvrir les performances immersives à 360°sous le dôme installé dans la cours du Château des ducs de Bretagne toute la semaine du festival. 
L'équipe de la SAT de Montréal revient sur ce projet fou réunissant modèles réduits de la Satosphère (18 mètres de diamètre et 13 mètres de hauteur), artistes internationaux, festivals et nouveaux publics toujours plus ébahis ! 
 

Comment avez-vous surmonté la contrainte de mobilité inhérente à la Satosphère de montréal, pour imaginer une tournée internationale qui propose une expérience similaire au public ?
 

Bien que la Société des arts technologiques soit reconnue pour son dispositif immersif d’avant-garde, le sujet de la tournée n’est pas tant le dispositif que le contenu des œuvres lui-même. Dans ce contexte, nous nous sommes donc associés à des prestataires européens pour nous fournir des versions mobiles qui s’apparentaient au mieux à notre instrument initial (la Satosphère, dôme de la SAT). La contrainte de mobilité nous a amenés à considérer des critères de dimension, de poids, de facilité de déploiement extérieur et de qualité de projection. Par la suite, en fonction des supports sélectionnés, nous avons choisi les alternatives de design que l’on a jugées les meilleures pour amener l’expérience du public aussi proche de ce que l’on souhaitait.

En effet, nous ne partons pas avec un dôme portatif dans notre sac en visitant des villes !

Plusieurs dômes seront déployés dans plusieurs villes au cours de l’automne et parfois en simultané. Les artistes sont en effet plus facilement mobiles que les dômes, ce qui nous permettra notamment de faire des événements dans plusieurs villes en parallèle. 

En ce qui concerne les dômes mobiles, nous avons choisi de travailler avec des écrans à pression négative et des projecteurs ultra haute définition pour une qualité d’image optimale, ainsi qu’avec un système de sonorisation à 8 canaux pour se rapprocher le plus possible de l’expérience de son grand frère (le système de la Satosphère, composé de 32 canaux portés par 157 hauts-parleurs), et donner ainsi à vivre une véritable expérience immersive spatialisée en 360°.

QUELS SONT LES OBJECTIFS DE CETTE TOURNÉE ? 

L’objectif de mettre en place cette tournée pour la SAT est à la fois d’aller à la rencontre des publics, des festivals, de faire découvrir des œuvres originales créées entre les murs de la SAT par des artistes canadiens et internationaux, dans le cadre de son programme de création d’œuvres en résidence; mais aussi et surtout de faire connaître un langage encore peu connu auprès du grand public international : celui de l’immersion des dômes numériques.

Avec cette première tournée, la SAT permet aux artistes émergents de se faire connaître à l’international et à certains artistes européens de présenter leur œuvre en première dans leur propre région. L’intérêt pour l’immersion est aujourd’hui très présent dans bien des festivals d’arts numérique, et si la SAT n’est pas l’unique épicentre de cette émulation globale, elle est reconnue comme une des plus grande productrices de performances immersives. Le momentum est là et il nous a semblé idéal pour aller à la rencontre d’autres centres de créations, de diffusion et de festivals pour nouer des liens autour de ce nouvel intérêt.

Comment les artistes se sont-ils emparés de cette nouvelle dimension, de ces nouveaux contextes de présentation?

La beauté des œuvres immersives génératives (créées en temps réel) c’est que ce sont des espaces d’expression virtuels combinant objets sonores, objets visuels, mouvement, trajectoire, qui constituent un écosystème scénographique complet et complexe ; et que ces créations-là peuvent être adaptées rapidement à de multiples plateformes immersives: dômes de différents formats, dispositifs multi projection, casques VR, dispositifs multicanaux, etc.
Naturellement, qui dit changement de modes de représentation, dit questionnement des artistes sur le point de vue qu’ils souhaitent favoriser dans cette nouvelle configuration. En fonction des lieux qui leur ont été donnés, les artistes on donc ré-imaginé la manière dont ils voulaient guider le public et redéfinissant leur points de vue sur l’œuvre dans un nouvel espace. Pour certaines salles comme la Gaîté lyrique, l’équipe de la SAT a par ailleurs fourni des modèles de simulation permettant de faciliter l’intégration du contenu ainsi que les choix des nouveaux points d’intérêt.

Comment avez-vous sélectionné les projets pour la première tournée internationale SAT Circuit?

Tout d’abord, la totalité des œuvres ont été créées ici à la SAT dans le cadre de notre programme de création d’œuvre en résidence et sont des performances audiovisuelles génératives (créées en temps réel). Toutes les œuvres sélectionnées se sont non seulement démarquées par leur approche novatrice de l’immersion mais ont également en commun une étude particulièrement intéressante qu’elles font du mouvement, de l’hybridité et de la physicalité, fondements de l’expérience immersive et thématiques de la tournée SAT Circuit. Le programme offre par ailleurs une variété de styles, en intégrant par exemple des œuvres sculpturales (Entropia) ou de creative coding (Interpolate).

Ensuite, le programme initial comportait 6 œuvres d’artistes canadiens, dans le but de faire découvrir au public international des talents d’ici, auxquelles se sont ajoutées trois œuvres d’artistes internationaux qui ont réalisé des œuvres significatives à la SAT. Enfin il a également été important pour nous d’avoir un certain équilibre à plusieurs niveaux : en termes de représentation femmes/hommes, mais aussi en termes de langue. Montréal étant une métropole bilingue, avoir des artistes anglophones et francophones était important pour faire découvrir les différente influences culturelles.

Cette tournée a-t-elle vocation à se développer? Allez-vous accueillir encore plus d’artistes internationaux?

Cette tournée majoritairement européenne à l’automne 2018 initie en effet un mouvement que l’on veut voir grandir et revenir. Nous avons ici une expertise encore peu répandue que l’on veut bien sûr amener ailleurs et faire connaître à de nouveaux publics, artistes et festivals. En amenant un nouveau médium dans de nouveaux contextes nous espérons encourager le mélange de disciplines artistiques et d’influences culturelles pour voir fleurir de nouvelles créations originales. Par ailleurs, la tournée déployant des espaces immersifs dans plusieurs endroits, a aussi vocation à donner aux artistes de nouveaux outils à expérimenter dans leur milieu naturel.
Notez que la tournée a déjà une saveur internationale car en plus de ses dates européennes, des représentation se sont ajoutées à Boston et Dubai!

Enfin, la SAT à travers son programme de résidences annuel invite d’ailleurs les créateurs du monde entier à soumettre des projets de création immersive, pour qu’ils soient développés en résidence et diffusés dans la Satosphère.

Quelles réactions du public avez-vous pu observer lors des performances immersives sous dôme ?

Le medium implique rapidement le public dans l’action par l’immensité de l’image et l’omniprésence du son et le sentiment de présence en collectif dans le canevas numérique suscite toujours des réactions.

C’est un peu comme si le public entier était dans un vaisseau navigant dans la proposition artistique !

Selon la nature des œuvres, certaines provoquent des formes d’hypnoses, d’autres des illusions sur la perception dont la vection (se sentir en mouvement), voire même des formes d’hallucination. Certaines personnes restent « scotchées » sur leur coussin à la fin d’une séance, tellement l’immersion audiovisuelle est imposante. Par ailleurs, l’effet du dôme qui n’est pas une salle de spectacle conventionnelle implique étrangement un sentiment de bien-être, procuré la forme même de l’architecture, comme une sorte de cocon collectif partagé, quelque chose qui de sécurisant même si la proposition artistique peut parfois être brusque et vertigineuse.