Anna Calvi + Joy Thomas

On l'avait découverte, silhouette filiforme et regard charbonneux, avec un premier album qui portait son nom, et surtout avec One Breath, tout en fulgurances électriques et échappées lyriques. Atmosphères lourdes, voire inquiétantes, mais portées par une voix à la féline langueur, One Breath détonnait en même temps qu'il fascinait, et l'on se prenait à imaginer l'Anglaise en succube tapie dans l'ombre épaisse d'un manoir gothique, ou en Moire démêlant, du bout de sa Fender, les trames obscures de l'existence des pauvres mortels que nous sommes. Dans la foulée, un album de reprises étonnait encore par le choix des morceaux (FKA Twigs, Suicide...) : de l'audace, toujours de l'audace, et une classe éblouissante. Surtout, son ardeur le dispute sur scène à une autorité magnétique, qui embarque et envoûte le spectateur, comme furent envoûtés les compagnons d'Ulysse par les Sirènes – excepté que vous n'aurez nul besoin de vous attacher à un mât.

Joy Thomas cache plusieurs noms en son sein : Proxima du Centaure pour le coucher du soleil et Cool Kit pour les nuits fauves. Où que soit son inspiration, elle est féminine et sensuelle, elle puise l’essence de ses sets dans le claquement des cordes vocales des femmes et relate, entre les morceaux, des rencontres érotiques éphémères. Figure incontournable du milieu queer nantais, elle fait souvent danser, parfois chavirer, mais captive toujours avec fougue le public venu l’écouter.