Ambivalences #3 : Mutations politiques

Comme toute technique, les produits et services numériques que nous utilisons au quotidien ne sont pas neutres et portent une vision politique de notre monde et de notre rapport aux objets techniques. Mais quelle est cette vision ? Libertaire et émancipatrice, comme celle qui semble avoir prévalu aux débuts d’Internet ? Ou centrée sur la productivité, l’efficience, la recherche d’automatisation et le contrôle et opposée à toute forme de régulation, comme celle qui  semble dominer à l’heure actuelle, a minima dans le numérique mainstream ? 

Expliciter et questionner les soubassements idéologiques des technologies numériques semble aujourd’hui plus que jamais nécessaire, tant elles affectent de manière croissante notre quotidien et notre rapport aux autres et au monde. Tout comme chercher à faire exister “d’autres numériques”, porteurs de visions politiques alternatives à celles développées par les géants du secteur - si tant est que cela soit encore possible…

En guise de conclusion du troisième et dernier cycle d’Ambivalences, dédié aux mutations politiques, cet après-midi de conférences et table ronde cherchera ainsi à décrire les projets politiques portés par la numérisation de nos sociétés, et à explorer les mutations politiques du numérique lui-même, depuis ses débuts jusqu’à aujourd’hui. Plus largement, il sera aussi question de la manière dont artistes, chercheur·ses et activistes contribuent à nourrir nos réflexions sur ce qu’est - ou pourrait être - le numérique, et de la relation ambivalente que nous entretenons avec lui.

Pour poursuivre ces réflexions, cette session d’Ambivalences sera suivie d'une lecture collective du livre de l'un⋅e des intervenant⋅es, proposée par l'association PiNG, le 20 septembre, de 18h à 21h à Hyperlien.

14:00-14:15 : Introduction

Pauline Briand, journaliste, rédactrice et consultante

14:15-14:30 : Conférence - Faire (ou défaire) l'utopie numérique

Cette conférence traitera de l’utopie numérique. La promesse qui nait dans la Silicon Valley au milieu des années 1990 d’une société décloisonnée, mieux informée, émancipée des contraintes matérielles grâce à Internet a été en partie honorée. Mais la société en réseaux alors rêvée semble loin d’être achevée. Sa mise en œuvre s'est faite au prix d’une dépendance aux géants du numérique, d’une économie mettant à mal des mécanismes de solidarité fondamentaux dans de nombreux pays, et d’une place renforcée des écrans dans nos vies. C’est à partir de ces constats qu’une politique du numérique peut être penser afin de faire, défaire ou refaire l'utopie numérique. 

Olivier Alexandre, chercheur en sociologie et auteur

14:30-14:45 : Conférence - Innovation et création : enjeux politiques des choix technologiques

En partant de la tendance à la destruction que cache l'innovation technologique, opposée à la création artistique qui tend vers la production de diversité, cette conférence abordera la question politique résidant dans le choix de technologies favorisant des modes d'existence différents et hétérogènes.

Anna Longo, philosophe et autrice

14:45-15:00 : Conférence - La société automatique

Dans notre prochain projet d’exposition “La société automatique”, notre intérêt porte sur une technologie qui devient graduellement ancrée dans nos vies : ce sont les technologies d’automatisation.

L’automatisation, l'action d'automatiser, de rendre automatique des tâches ou des suites d’opérations, se retrouve à la base de toutes les révolutions industrielles depuis la fin du XVIIIe siècle. Enveloppé toujours comme un outil de progrès pour libérer l’être humain de la pénurie du travail répétitif, on constate que non seulement les tâches humaines n’ont pas disparues face à la mécanisation et la robotisation, mais qu’au contraire, elles mutent constamment vers des conditions de travail tout aussi aliénantes.

C’est le fantasme de l’automatisation complète, développé depuis le taylorisme et qui ne cesse de se re-affirmer depuis, la menace du remplacement de l’humain par la machine.

Felix Luque Sanchez, artiste

15:00-15:15 : Pause

15:15-16:30 : Table ronde

Avec :
Olivier Alexandre, chercheur en sociologie et auteur
Anna Longo, philosophe et autrice
Felix Luque Sanchez, artiste
Modération : Pauline Briand, journaliste, rédactrice et consultante

16:30-17:00 : Conclusion du cycle Ambivalences

Cet événement marquant la fin du cycle de rencontres Ambivalences (du moins dans sa version initiale), ce dernier temps de l’après-midi sera l’occasion de revenir sur les trois saisons passées, d’évoquer les enseignements qu’elles ont permis de tirer, et d’aborder les perspectives ouvertes par cette collaboration.

Avec :
Luc Brou, festival ]interstice[/Oblique/s
Samuel Arnoux, festival Maintenant/Electroni[k]
Martin Lambert, festival Scopitone/Stereolux

Pauline Briand 

Pauline Briand est journaliste et autrice spécialiste des enjeux environnementaux. Pour Billebaude, Usbek & Rica ou le Musée national d'Histoire Naturelle, elle a écrit sur la myxomatose, les forêts et le changement climatique, la disparition des insectes, l'évolution de la vie, et l'anthropologie au-delà de l'humain. Auprès d’Astrid de la Chapelle, de Disnovation, de the Internet of Dead Things Institute et de Nicolas Nova, elle participe à des projets entre art et recherche qui travaillent le récit de l’Île de Pâques aux hybridations de l’Anthropocène. Pauline Briand contribue au Centre des Politiques de la Terre. 

https://paulinebriand.cargo.site

Olivier Alexandre

Olivier Alexandre est sociologue, chargé de recherche au CNRS, ancien visiting scholar de Northwestern University et de Stanford. Ses travaux portent sur la culture et le numérique. Il a notamment publié La Règle de l’exception. L’écologie du cinéma français (Editions de l’EHESS, 2015) et La Tech. Quand la Silicon Valley refait le monde (éditions du Seuil, 2023).

Anna Longo

Anna Longo est docteur en philosophie esthétique (université Paris 1). Elle est actuellement directrice de programme au Collège international de philosophie (CIPh, Paris) et enseignante à l'Institut Mines Télécom Business School. Autrice de Le jeu de l'induction : automatisation de la connaissance et réflexion philosophique (éditions Mimesis, 2022), elle a dirigé plusieurs ouvrages et publié dans nombreuses revues internationales.

Felix Luque Sanchez

« Le travail de Felix Luque Sánchez, en collaboration avec Iñigo Bilbao, Damien Gernay et Vincent Evrard, interroge la manière de concevoir notre rapport à la technologie ainsi que les enjeux contemporains du développement de l’intelligence artificielle et de l’automatisation. A partir de l’utilisation combinée de systèmes de représentations électroniques et digitales, de sculptures mécatroniques, de compositions sonores génératives, de flux de données en temps réel et de processus algorithmiques, les procédés narratifs sur lesquels reposent ses installations entremêlent fiction et réalité et préfigurent les scénarios possibles d’un futur proche, en nous confrontant aux peurs et aux attentes que les machines provoquent en nous ». Pau Waelder

www.felixluque.com