Logo Stereolux

J’ai testé : Doc’N’Co / Straight To You : Nick Cave – A Portrait + Concert d’Elise Bourn

Musique Publié le 24/06/2021

THE CREW - J'AI TESTÉ

Doc’N’Co est un format mêlant l’art du cinéma documentaire et l’art de la représentation, en proposant une projection suivie d’un concert dans le cadre d’un couple musical thématique. Le 15 juin 2021, c'est Nick Cave qui était à l'honneur avec la diffusion du documentaire biographique réalisé par Nanni Jacobson suivi d'un concert d'Elise Bourn reprenant certains morceaux de l'artiste. Retour sur cette édition avec l'un de nos bénévoles qui était sur place.

DOC’

Straight To You, littéralement directement à toi/vous (au choix selon la proximité qu’on applique à mister Cave), ou "sans filtre" au sens figuré. Un titre emprunté au morceau du même nom présent sur l’album Henry’s Dream réalisé avec l’équipe internationale des Bad Seeds en 1992, un an seulement avant la première diffusion du documentaire du réalisateur Nanni Jacobson. Le film s’articule autour de chapitres thématiquement distincts – music, books, acting…– balayant les vingt premières années de la, ou plutôt des carrières d’un des exports les plus célèbres d'Australie.

Le ‘straight to us’ se décline à de multiples échelles dans l’épopée d’apparence tumultueuse qui nous est montrée. Ce sont des entretiens où Nick Cave s’adresse à un correspondant invisible qui fondent la partie biographique. Nick Cave par Nick Cave, dans un cadre quasi confessionnel ; ce qui fait sens, une fois que nous est révélé son attrait pour la narration biblique. Sans rire, la Bible c’est son truc.

‘Straight to us’ aussi dans le choix de l’habillage musical : les enregistrements studios se font rares et les lives ont la part belle pour illustrer la progression des sensibilités prog rock instillées par son frère, jusqu’à la période brésilienne où se termine le documentaire, symbole d’une maturité stylistique difficilement catégorisable.

Enfin, le côté brut, direct, se retrouve aussi dans les partis pris filmiques. Si une structure chapitrée est mise en avant – littéralement illustrée par une succession d’autoportraits gribouillés par Cave dans son bar préféré de São Paulo –, le montage revendique un certain chaos dans sa linéarité semi-chronologique. Bien qu’on se dirige irrémédiablement d’une origine vers un aujourd’hui des années 1990, on saute entre différents passés en revenant ponctuellement au présent sans en avoir forcément conscience. Les interviews de l’artiste ne sont pas datées et allez donner un âge au bonhomme, je vous en défie. Ce qui produit tout autant un maelstrom en surface, qu’une entité en réalité homogène où la continuité temps n’est pas le sujet. 

Une suite intéressante pourrait être de diffuser One More Time with Feeling paru en 2016, qui bien que faisant suite à la mort tragique de son fils Arthur et non dans une continuité au film de Jacobson, permettrait d’un point de vue documentaire de prolonger l’observation du personnage atypique et résolument influent qu’est Nick Cave.

 

 

 

 

 

N’CO

L’écran se lève, et des techniciens préparent la scène : un stand pour un instrument à corde, un micro, et un clavier. Après une longue pause imprévue où les convives de la soirée ont profité de l’intervalle préparatif pour se désaltérer, Elise Bourn se présente seule avec sa guitare. Ce sera sa performance à elle. Le concert débute par un morceau-prologue de sa propre composition.

Ce n’est qu’ensuite qu’elle choisit de s’introduire à nous. Son interaction avec le public est spontanée et sincère. Après un bref passage sur sa propre histoire entre kiwis et petits LU, la jeune artiste nous transmet son amour pour « l’oncle Nick ». Amour peu anodin pour une auteure-compositrice qui a reconnu avoir mis du temps à développer sa curiosité musicale. 
Le corps du concert est ensuite lancé, toujours à la guitare, avec le There Is A Kingdom de Nick Cave & The Bad Seeds. La représentation sera ponctuée d’anecdotes alternant entre les connexions à la musique de l’australien (Red Right Hand appris par le biais du visionnage de Peaky Blinders par exemple) et de commentaires plus classiques sur ses propres morceaux.

Que ce soit au piano ou à la guitare, le travail d’arrangement et d’harmonisation de Bourn pour fondre les œuvres de Cave aux siennes est absolument remarquable de finesse. Ce qui est loin d’être une évidence au premier abord tant le travail de groupe – avec les Bad Seeds notamment – et de sonorités abrasives des compositions caviennes semblent peu propices à l’épuration.
L’expression musicale en elle-même aura été absolument i-m-p-e-c-c-a-b-l-e. Puissante, subtile, et tout autant espiègle qu’intime. Sans ne serait-ce qu’une once d’hésitation ou d’accident où que ce soit. Bourn aura donné son propre ‘straight to you’ aux personnes présentes ce 15 Juin, et ça aura été un privilège d’avoir pu y assister.

Pour celles et ceux souhaitant reproduire grâce à l’Internet un ersatz de l’expérience offerte, voici la setlist fournie avec un enthousiasme déconcertant par la pétillante Elise Bourn en personne :

 

Crown / E.B.
There Is A Kingdom / N.C.
Red Right Hand / N.C.
Moses / E.B.
(Are You) The One I’ve Been Waiting for / N.C
Procrastination / E.B.
Aftertaste / E.B.
What I Know / N.C.
Run / E.B.
Love Letter / N.C.
Accident / E.B.

Et pour en savoir plus sur la néo-zélandonantaise, un entretien chez les voisin.es de Trempo.