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Obi Bora : "Cette tournée est un cadeau" (interview)

Musique Publié le 25/11/2021

Obi Bora a plusieurs vies derrière lui. Nigérian, il quitte son pays et arrive en Europe clandestinement dans des conditions inimaginables. À Lyon, on lui donne la possibilité de s'exprimer ; l'artiste la saisit. Il présente aujourd'hui une musique fédératrice et généreuse mêlant afro, soul, electro, hip-hop. Rencontre avec un artiste au parcours atypique.

Obi Bora + Uzi Freyja


Vous avez connu l’errance pendant presque 10 ans à travers l’Europe entre squats et expulsions. Pourtant votre musique ne semble pas empreinte de rancune et est au contraire fédératrice, entraînante et pleine d’espoir. Quand vous avez commencé à composer , aviez vous déjà dans l’idée de diffuser une musique fédératrice ou était-ce un projet plutôt personnel/introspectif ?

O. B. : Je n’avais aucun projet en tête lorsque j'ai commencé à écrire mes chansons. Il faut se remettre dans le contexte : c’était en 2011, je m’étais égaré plusieurs jours dans le Sahara lorsque j’essayais d’atteindre le Maroc par l’Algérie. Je priais dans ma tête car je pensais que j’allais mourrir, et parfois aussi je chantais des chansons pour me donner du courage : Tupac, Bob Marley… A un moment tout s’est mélangé, et j’ai commencé à chanter mes prières, à les rapper. J’ai réussi à sortir du désert, mais je n’ai depuis jamais cessé d’écrire des chansons. On peut donc dire qu’à l’origine mes chansons étaient introspectives, mais pourtant elles ont toujours été faites pour être entendues, comme des prières. Mon premier album s’appelle d’ailleurs « Black Prayers ». 

 

Continuez-vous à composer depuis votre ordinateur qui vous a suivi tout au long de votre périple ces dernières années ?

O. B. : Oui et non ! J’ai pu acheter mon ordinateur en 2019 après un séjour de 6 mois en prison à Genève, parce que j’étais « illégal », c’est à dire clandestin. Jusque là, je gardais la musique dans ma tête, et j’avais pu faire quelques jours de studio en Italie en 2016 grâce au hasard d’une rencontre. Lorsque j’entrais en prison en Suisse, je pensais toucher le fond, mais ça a été une chance finalement, car j’ai pu faire des petits boulots en prison et gagner comme ça un peu d’argent. A la sortie de prison, j’ai pu acheter mon ordinateur, et je me suis rendu en France. Je me suis installé dans un squat à Lyon, et grâce à des tutos youtube j’ai vite compris comment enregistrer mes chansons sur Logic Pro. Ce premier ordinateur, qui était déjà bien abimé quand je l’ai acheté, a rendu l’âme il y a quelques semaines. Mais nous avons transféré toute sa mémoire dans un nouveau, tout neuf. J’ai donc retrouvé l’univers que je me suis créé, et lui ai offert une nouvelle jeunesse !

Vous êtes en pleine tournée, votre musique voyage désormais, elle fait parler et éveille peut être les consciences. De quelle manière appréhendiez-vous cette tournée ? Et comment se déroule-t-elle jusqu'à présent ?

O. B. : Cette tournée est un cadeau. J’ai beaucoup voyagé dans ma vie, mais jusque là c’était pour fuir. Je n’avais aucune destination en tête, je m’arrêtais là où le destin me faisait comprendre que la vie quotidienne serait peut être moins dure. Aujourd’hui c’est tellement différent. Je me rends dans des villes où je suis invité, attendu. Je viens rencontrer des gens, donner mes chansons au public, et eux me donnent tellement d’énergie en retour. 

Nous sommes ravis de vous accueillir à Nantes.  À quelques jours de votre date à Stereolux, comment appréhendez-vous votre rencontre avec le public nantais ?

O. B. : Je suis heureux de découvrir Nantes et je vous remercie pour l’invitation. Surtout que je vais venir 2 jours car la veille du concert je vais passer une journée à Stereolux avec un groupe de jeunes pour écrire des chansons ensemble, sans pression, pour le plaisir de la rencontre. J’ai hâte de jouer pour le public nantais, ce sera la toute première fois dans cette ville. Merci beaucoup.