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Vicious Circle : faire vivre les valeurs de l’indépendance

Publié le 28/10/2021

Un label de rock, fondé en 1993 à Bordeaux et survivant contre vents et marées en totale indépendance. Vicious Circle est clairement une exception dans le paysage musical français. Cela tient surtout à son catalogue exceptionnel : Shannon Wright, Chokebore, Mansfield TYA, The Notwist, The Ex, suivis récemment par la fine fleur du rock français Lysistrata, Psychotic Monks, Slift, ou les Belges d’It It Anita. Un mélange d’historique et de nouveauté, à l’image du concert organisé le 4 novembre, unissant Shannon Wright, Troy Von Balthazar (ex Chokebore), et le tout jeune Elias Dris.

Le Beau Label I Vicious Circle : Shannon Wright · Troy Von Balthazar · Elias Dris


S’il a surmonté toutes les crises du disque, Vicious Circle doit désormais se relever de son plus grand choc : la mort de son unique fondateur, Philippe Couderc. Également créateur en 1987 du fanzine Abus Dangereux (qui publie son ultime numéro), il reste omniprésent dans les discours sur le label. Pour Guillaume Le Collen, employé depuis 2008, en plus de la perte d’un ami proche, « c’est un gros vide. Il insufflait les projets, chapeautait tout ». Mais il reste confiant : « Philippe était très organisé, il avait construit une structure solide, qui ne s’est pas effondrée. » Beaucoup de projets restent à venir, comme le prouve la récente signature avec le projet La Colonie de Vacances, qui passera le 9 février par Stereolux. Car si Vicious Circle a une place si importante dans l’écosystème indépendant, c’est grâce à un socle de valeurs toujours respectées.

Portrait de Philippe Couderc par Olivier Chaos.

Pur amour de la musique

Si Vicious Circle est aussi respecté, c’est d’abord grâce à son catalogue, construit avec amour. « Philippe signait des groupes à l’affectif, à l’instinct » explique Guillaume. Et cela se ressent directement chez les artistes. « Quand on s’est rencontrés, j’ai senti que Philippe aimait non seulement la musique mais aussi les artistes » abonde Elias Dris. C’est cette confiance en les artistes qui fait la différence. Troy Von Balthazar nous confie : « En 2016, quand j’ai sorti Knights Of Something, un album très triste et sombre, un gros label m’aurait demandé un single, un morceau plus joyeux. Pas Vicious. L’équipe ne me demande jamais de modifier quoi que ce soit. C’est rare. Cette confiance fait que je me sens plus en sécurité, artistiquement. » 

 

Qualité du relationnel

C’est cette proximité qui a séduit Shannon Wright. La découvrant lors d’un concert, Philippe souhaitait la signer sans attendre. « J’ai immédiatement senti une connexion avec Philippe, et senti sa sincérité » raconte la chanteuse, qui met en avant la simplicité des relations avec le label. « Je suis là depuis vingt ans, et les choses sont toujours les mêmes. Leurs valeurs sont profondément intégrées. » Elias Dris abonde : « Philippe avait cette capacité à donner l’impression que tout est super simple. Si on veut sortir un album, on sort un album, et puis voilà. »

 

Défense du secteur indépendant

Ce travail de confiance va bien au-delà des artistes. Société de distribution, de tournées, médias, pour Guillaume, « Philippe avait développé un réseau dans tout l’écosystème musical français », et il a également contribué à le structurer au niveau politique. Se battant pour la reconnaissance du modèle indépendant, Philippe Couderc a participé à la création de plusieurs fédérations de labels, comme la FEPPIA au niveau de la région Aquitaine, mais aussi la FÉLIN (Fédération Nationale des Labels Indépendants). Ces structures regroupent plus de 200 labels, leur permettant d’être audible auprès d’élus locaux, de ministres ou de grandes enseignes comme la Fnac. En plus de ne pas être mis de côté dans les décisions, une telle structure favorise également les échanges et discussions au sein du milieu.

Ne pas être puristes

Par la valorisation de ce maillage indépendant, Vicious Circle fait également vivre la culture hors de Paris. Dans une France encore très centralisée, il est important, souligne Guillaume, de « ne laisser personne de côté ». Ce qui n’empêche pas de défendre ses artistes sur le plan national : « On fait toujours le maximum. Je parle tout autant à France Inter et à New Noise qu’aux webzines locaux. » Un refus du sectarisme qui se ressent aussi dans le catalogue, où l’identité rock se teinte de dub, chanson, folk ou hip-hop. C’est ainsi que Vicious Circle subsiste, et subsistera encore : en s’adaptant, toujours, sans jamais trahir ses valeurs.

 

Article écrit par Antoine Gailhanou