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Hiroaki Umeda, dancer in the storm

Arts numériques Danse Publié le 18/03/2016

STEREOLUX CONSACRE UNE SOIREE SPECIALE AU CHOREGRAPHE JAPONAIS HIROAKI UMEDA AVEC DEUX DE SES SOLOS, HOLISTIC STRATA ET SPLIT FLOW
Une expérience sensorielle inédite qui plonge le corps du danseur dans une véritable tempête numérique et peut provoquer, chez le spectateur, de sérieuses commotions esthétiques. 

A trente-sept ans, Hiroaki Umeda fait partie de cette génération d’artistes de la scène qui savent à peu près tout faire. Chorégraphe et interprète, mais aussi compositeur, vidéaste, plasticien, le Japonais, leader de l’avant-garde chorégraphique en son pays, se met généralement seul en scène, assumant l’entière autonomie de son art. OEuvres d’art totales, minimales et radicales, ses spectacles absorbent littéralement le corps du danseur dans la lumière et le son, à tel point que l’on aurait du mal à enfermer la pratique d’Umeda dans une seule catégorie artistique. 

Une nouvelle réalité 

Né en 1977 à Tokyo, où il vit toujours, Hiroaki Umeda a d’abord étudié la photographie à l’université. D’où, pourrait-on en déduire, un certain sens du cadre, de l’éclairage, de la pose, qu’il mettra à profit plus tard sur scène. Ce n’est qu’à l’âge de vingt ans que le jeune artiste s’inscrit à des cours de danse, domaine dont il explore avec boulimie tous les styles : hip hop, classique, danse moderne, danses traditionnelles d’Asie, que l’on retrouve aujourd’hui mêlés dans son langage corporel.

A l’âge de vingt-trois ans, il fonde sa propre compagnie, S20. Nous sommes en l’an 2000 et le futur n’a jamais été aussi lointain. Pourtant, avec S20, Hiroaki Umeda se situe dans une démarche résolument prospective, qui intègre les nouvelles technologies du son et de l’image au champ de la représentation scénique. Dès 2002, le chorégraphe est invité à se produire en France, marquant le début d’une carrière internationale ininterrompue. 

A la fois subtile et brutale, l’esthétique de Hiroaki Umeda, qui le plus souvent imagine des solos qu’il interprète lui-même, se résume en un mix d’éléments : imagerie numérique, paysage sonore minimal et puissante présence du corps créent, à eux trois, une nouvelle réalité. Mêlant les disciplines, l’artiste rend la matière à la lumière et au temps. Au coeur de la philosophie artistique du Japonais : l’holistique. Considérant l’univers comme un tout, le chorégraphe fusionne dans sa danse le corps, l’image et le son.

La scène devient alors une «extra-zone» virtuelle, délimitée par un graphisme épuré, où l’espace et le temps se confondent. Comme dans l’art cinétique, chaque instant correspond à un mouvement : dans les pièces de Hiroaki Umeda, il n’y a pas de pauses, le spectateur est plongé dans un tunnel de perceptions sensorielles dont il sort étourdi.

Bourrasques pixellisées 

C’est cette notion de «Tout» qui est mise en oeuvre dans l’une des pièces d’Umeda qui a jusqu’ici rencontré le plus de succès, Holistic Strata, créée en 2011, et que l’artiste reprend cette année à Stereolux. Nécessitant un dispositif visuel et sonore complexe travaillé jusqu’à la dernière minute sur ordinateur par le chorégraphe lui-même, elle fait appel à tous les sens – plus qu’à l’intellect. Au son crépitant d’une musique électronique aiguë, le corps du danseur se fond dans une tempête de neige lumineuse, suite de bourrasques pixellisées en noir et blanc. Tel un génie numérique, Hiroaki Umeda crée par ses mouvements, très hip hop, le paysage éphémère qui surgit de lui en ondes soudaines, et met sous tension le spectateur rivé à cette furieuse science-fiction. 

Autre solo présenté à Stereolux, Split Flow, dernière création d’Umeda, prend pour modèle chorégraphique assumé la danse urbaine, et notamment le popping qui fait courir une vague électrique le long du corps de l’interprète. De ce ballet mécanique rapide surgissent par ralentis des gestes gracieux de ballerine, comme des respirations.

Le rythme s’interrompt par saccades : ce «flux découpé», vivement éclairé de flashs de laser et de rais de lumière, plonge le spectateur dans un bain d’impressions visuelles et sonores. La danse rejoint alors les arts plastiques et le corps, dont l’écriture est dictée par la machine, devient une abstraction, comme une métaphore de l’immersion de l’homme dans le virtuel et le «Tout» technologique.

La présence du danseur se poursuit hors de lui-même, dans tout l’espace qui l’entoure, jusqu’à irradier le spectateur, ébranlé par cette commotion inédite. Préparez-vous à vibrer.