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Coline Pierré et Loïc Froissart donnent vie aux ogres (qui ne mangent plus d'enfants) - interview

Action culturelle Publié le 07/11/2018

Il y a très longtemps le monde était peuplé d'ogres qui passaient leur temps à manger des enfants... Jusqu'au jour où cette nourriture devint la source d'une curieuse épidémie. Loïc Froissart à l'illustration et Coline Pierré à la lecture et aux bruitages proposent une version live de cette histoire qui évoque, à hauteur d’enfant, un sujet d’actualité : le spécisme.

quel est votre parcours et celui de Loïc Froissart, et comment vous-êtes vous retrouvés sur ce projet ?

Coline : Je publie des romans pour enfants et adolescents depuis 2013, principalement à l’Ecole des Loisirs et aux éditions du Rouergue jeunesse. 
Loïc a illustré la couverture de mon second roman, L’immeuble qui avait le vertige, publié aux éditions du Rouergue. Comme il avait aimé mon texte (et moi j'aimais beaucoup son dessin), il m’a proposé qu’on imagine un projet ensemble. J’ai donc écrit pour lui un texte que j’avais en tête, qui était Le jour où les ogres ont cessé de manger des enfants
Ensuite, entre le moment où nous avons commencé à travailler dessus et sa publication, il y a eu 3 ans. Du coup, nous avons aussi eu envie de monter une lecture dessinée et sonore ensemble, L’oiseau Silence, que nous avons jouée à Stereolux l’an dernier. 
À la sortie de Le jour où les ogres ont cessé de manger des enfants, l’idée d’en faire également une lecture dessinée et musicale était là. 
Alors quand on festival littéraire nous a proposé d'en créer une lors de cet événement, nous avons sauté sur l’occasion.  

Loïc : J'ai une formation en graphisme et je publie des livres depuis 2012 chez différents éditeurs. Quand j'ai lu le roman de Coline pour en réaliser la couverture, j'avais très envie de mettre des dessins sur ses mots. Le texte des ogres m'a tout de suite beaucoup plu, je l'ai trouvé non seulement drôle mais aussi engagé d'une manière qui laissait la place à la réflexion, j'ai senti que je pourrais y amener aussi mon point de vue.

 

L’histoire aborde de manière métaphorique un sujet d’actualité : le spécisme, c'est à DIRE LE FAIT de penser l'etre humain superieur à l'animal . Quelles questions soulève ce sujet auprès d’un public jeune ? Quelles réactions avez-vous pu observer ?

Coline : De manière générale, les enfants réagissent plutôt bien. Ils comprennent la métaphore, se questionnent, sans pour autant être particulièrement effrayés. 
La cruauté du texte de l’album est finalement très bien contrebalancée par l’humour des dessins. Et puis les enfants sont friands d’histoires qui font peur, dans lesquelles les enfants sont les victimes de grands méchants comme les loups, les ogres...
Finalement, ce sont plus souvent les parents qui craignent que les enfants réagissent mal. 
Une seule fois, j’ai vu un enfant feuilleter l’album puis le refermer avec un air un peu inquiet. 

Loïc : La violence n'est pas tellement dans les images comme elle ne parait pas non plus dans nos assiettes quand on mange de la viande. Les enfants entendent bien les questions que posent le livre mais il s'en amusent aussi, je suis intervenu dans une classe ou les enfants avaient eux-mêmes inventé des recettes à base d'enfants, c'était encore plus effrayant que la version de Coline.
 


Quelle est la valeur ajoutée d’une lecture dessinée par rapport à un livre ? Et comment avez-vous justement travaillé ce passage de la lecture au spectacle vivant ?

Coline : Lors du passage à la lecture, nous avons repensé le découpage de l'histoire pour le rendre plus dynamique. Les images sont moins nombreuses, différentes, en noir et blanc…  Avec ces nouvelles images et la musique qui vient s'ajouter, nous plaçons peut-être davantage le spectateur du côté des ogres : leurs émotions sont mises en avant, nous sommes plus en empathie avec eux. Il y a une alternance de moments mélancoliques, drôles, ridicules, qui les rendent finalement très humains.

Loïc : Il y a eu un vrai travail d'adaptation, le dessin ne pouvait pas être identique au livre, les contraintes du dessin en direct et la technique utilisée ne permettent pas de faire des images très complexes, il y a eu au départ l'impression d'en faire une sorte de résumé. On s'est rendus compte ensuite que le travail qu'a fait Coline sur la musique et les bruitages apportait une autre émotion, ça a enrichi l'histoire d'une manière un peu inattendue.