Juliette Armanet + 1ere partie

Collégien, j'avais une petite amie qui s'appelait Juliette. Grande, fine, un peu lunaire, elle se promenait souvent avec sa guitare sur le dos, chantait tout le temps et partout – en cours, dans le bus, au café – et cela m'émerveillait, le ciel s'éclaircissait, le cœur s'allégeait, c'était toujours la promesse d'une belle journée, comme la saveur d'un baiser. Bientôt nous rompîmes, Juliette continuait de chanter, et mon cœur de danser. Nous nous perdîmes de vue, le temps mangea la vie. Puis, en 2017, alors que je m'attardais dans les rayonnages d'un magasin de disques, mon regard tomba sur la couv d'un vinyle : portrait de profil d'une jeune femme trois fois couronnée. Juliette Armanet était son nom, et Petite Amie celui de son (premier) album. Par une de ces mystérieuses et soudaines réminiscences qui font bondir le cœur dans la poitrine et s'égarer l'esprit, le souvenir de Juliette jaillit en moi. J'achetai donc l'album et l'écoutais sitôt rentré. Se dégageait de ces chansons un tempérament, une voix, gracile et confiante, qu'accompagnait un piano qui eût pu être celui de Sheller, ou celui de Sanson, ou celui de Berger, ou même celui de Barbara. Parfois, le rythme s'accélérait, les tempi se faisaient sautillants, comme une manière de disco-funk. Avec, tout le long, des émotions en papillotes, de pudiques dévoilements, une complicité immédiate avec qui l'écoute.

Elle est depuis devenue phénomène, icône presque, son nom résonnant partout : chanteuse chic et audacieuse, avec un nouvel album espéré, attendu comme le jour des frites à la cantine. Et moi de me demander ce qu'est devenue Juliette, ma petite amie du collège.